[Validé][Guerrier/MDAR][H] Romeo Rosencrantz

Citation :

Nom du compte joueur forum : Sheltriel
Nom du compte joueur module : Bardora-
Nom du perso : Romeo Rosencrantz
Race : Humain.
Âge : 28 Ans.
Alignement : Loyal et Mauvais.
Religion : Le Cimeterre (autrement, respect général des autres Dieux, en particulier Tempus).
Classe et nombre de niveaux prévus : Guerrier 18 / Maître d’armes 7.
Arme de prédilection: Cimeterre.
Langues : Commune.
Trait de Caractère : courtois, curieux, droit, appliqué.

Description physique : Romeo est un homme de haute taille, au maintien droit et martial. Le corps bien proportionné, la silhouette musculeuse, lui confère une certaine allure.

Sa peau est légèrement basanée, lui offrant un soupçon d’exotisme. Les traits de son visage sont plutôt fermes, mais n’exclut pas la douceur, tandis que vous remarquez une large cicatrice traversant la pommette gauche et rejoignant l’arcade sourcilière du même côté.

En vous voyant, il se fend d’un léger sourire, vous jaugeant du regard.

Un cimeterre pend en permanence à sa ceinture.

Caractéristiques :

FOR : 14
DEXT : 13
CON : 14
INT : 14
SAG : 11
CHA : 12

Background :

Nous n’avons que peu de temps avant votre leçon de mathématiques, puis le rendez-vous avec le duc. Vous devriez essayer plutôt cette lame, jeune maître.
- *voix enfantine* Êtes-vous sûr, Khalim ? Je vois toujours père armé d'une épée longue. Qu'est-ce donc que cette arme ?
- On l'appelle le cimeterre, ou parfois "Shamshir", ce qui signifie dans une très ancienne langue "Queue de lion".
- "Queue de Lion" ? *à moitié confus, examine de loin le cimeterre* ... La lame est tordue, est-ce normal ?
- *délicat rire amusé* Point tordue, petit seigneur, mais courbée. L'intérêt d'une telle arme est que la courbure permet de glisser sur les surfaces dures, comme la plaque ou la maille. Ainsi, l'on peut facilement reprendre une attaque manquée, là où une épée dite "classique" mettrai plus de temps à être dégagée.
- Vraiment ? Elle doit être rudement efficace ! *fronce les sourcils* Mais que dirait père ?
- N'ayez crainte, jeune maître, j'ai déjà discuté de cela avec lui, et il m'a donné de bon coeur la permission de varier quelque peu votre éducation martiale, si toutefois vous y consentez.
- *petit sourire farouche* Cela m'a l'air intéressant, oui ! Et père m'a déjà conté qu'il vous faisait aveuglément confiance depuis que vous lui avez sauvé la vie sur le champ de bataille, et...
- *le coupe, mais adopte un ton doux pour ne pas froisser l'enfant* Certes oui, petit seigneur. Mais c'est une autre histoire *lui jetant le cimeterre aux pieds* A présent, en garde, Romeo Rosencrantz !

...

Fils de la dynastie Rosencrantz , à proximité d’Amn, Romeo vécu son enfance dans un milieu aisé te instruit, profitant de tuteurs particuliers. Son père, un grand général au nom de Sanan, s’occupa seul – le mot est relatif, pour un noble – de son fils, la mère étant morte bien trop tôt. C’est l’une des raisons qui fit que Romeo grandit dans une ambiance très martiale et dénuée de douceur, ce qui ne l’empêcha pas de recevoir une éducation très distinguée, eut égard à son rang.

Très tôt, Sanan prit soin d’orienter sa progéniture vers le métier de guerre, plein d’avenir en ces temps troublés, du moment que l’on restait en vie. Il reçut donc un entraînement stratégique et martial rigoureux, la plus grande partie de cette tâche ardue échouant à Khalim, compagnon d’arme du seigneur Rosencrantz dans maintes campagnes. Khalim était un nomade, qui plus est le cousin de Rosana, la mère de Romeo, qui n’en sut jamais plus sur celle qui lui donna la vie, seulement que cela expliquait son teint basané et que son père concevait une grande tristesse du fait de l’avoir perdue.

La vie continua, Romeo grandit au rythme des leçons d’escrime au cimeterre, parsemé de bals et de rencontres à diverses Cours. Approchant la quinzaine d’années, et avec la bénédiction de son père, Romeo s’engagea dans la voie des armes de manière plus officielle, entrant dans une armée noble en campagne. Le jeune Rosencrantz fut traité en simple soldat, selon les souhaits de son géniteur, qui comptait bien que la leçon fut profitable au maximum.

...

Romeo ouvrit lentement les yeux, mettant un instant à prendre conscience qu'il était allongé sur une couchette, le bruit du vent soufflant sur la tente où il se trouvait. Le rabat de la toile s'ouvrit brusquement, laissant entrer un homme de haute stature, les cheveux presque rasés, et la barbe dans le même état. Le visage grave et couvert de cicatrices du guerrier laissait percer une grande expérience des champs de bataille. Romeo appréciait la compagnie de Grissom. Le vétéran, d'humeur joviale et plaisantant en permanence, avait toujours quelques conseils fort utiles à donner au jeune combattant.

Ah tiens, enfin réveillé, mon gaillard ? *vaste sourire*
- *amusé* Grissom, je suis noble et tu es fils de forgeron...
- Bah ! Qu'on te coupe un bras sur le champ de bataille d'en bas et tu verras, tu pisseras du sang entièrement rouge, sans une goutte bleue !
- *maussade* Je ne suis pas pressé d'avoir l'occasion de le vérifier.
- Ce qui se comprends aisément, Romeo *accolade franche et brutale à Romeo* Blague à part, nous allons bientôt donner l'assaut.
- Au crépuscule ? Mais à quoi pense Bardora ?! L'on risque fort de se rompre le coup à cheval.
- L'effet de surprise, mon petit. Et puis, il est plus agréable de combattre dans la fraîcheur du soir que sous un soleil de plomb !
- Venant de toi, ça ne m'étonne pas *rieur* Cela dit, j'avoue avoir d'autres préoccupations que la température ambiante quand une horde d'orcs se jette sur moi.
- *geste ample de la main* Tu verras, tu t'y feras. Ils ne sont pas plus dangereux que des fillettes, et je suis même tenté d'emporter une gourde plutôt que mon bouclier, dans cette chaleur étouffante.
- *ironique* Evidemment. Pourquoi ne pas demander de l'eau aux orcs, par la même occasion ?
- J'ai déjà essayé, fiston, mais ils ne semblent pas comprendre le son de ma hache quand je leur la lance.
- Forcément, tu as l'air aussi sauvage et délabré qu'eux.
- Moi au moins, je ne me promène pas avec un dard, moi.

*un son de trompe orc se fait entendre*

- Sacrebleu ! Ils ont eu la même idée que nous !
- Au moins, cela nous évitera de chuter à cheval.
- Ça ne change rien ! Où sera notre génie militaire si l'on se contente de les écraser pendant qu'ils attaquent ?
- Trêve de palabre, mon ami *s'affaire à ajuster son harnois, tout en cherchant son heaume et son pavois, le cimeterre à la ceinture* Tâche de ne pas te faire tuer en leur mendiant de quoi boire.
- Ne t'inquiètes pas pour moi, jeunot, je préférerai lécher les aisselles du commandant Bardora que de goûter à leur eau croupie.
- A ce point ? Tu dois vraiment l'aimer, notre chef.
- Plus que les orcs, c'est sûr. Essaie d'en piquer un ou deux avec ton aiguille, tu me diras à la fin s'ils ont senti quelque chose *énorme rire, tandis qu'il s'engouffre vers la sortie, emboîté par Romeo*

Tous deux s’en sortirent fort bien, Grissom opérant même une véritable trouée parmi les rangs orcs, criant à la fin de la bataille à qui voulait l'entendre qu'il n'avait fait que rêver d'une bonne bière, tandis que les orcs se jetaient sur sa hache.

…

Les milieux martiaux comme celui où se trouvait Romeo sont des endroits propices à Tempus. Point forcément que l’on s’y fait adepte, mais l’on apprend à connaître le Dieu, du fait des attributs même du Marteleur d’ennemis, et de la rencontre avec les nombreux représentant du Clergé. Romeo déploya une grande sympathie pour les préceptes du Seigneur des batailles, sans pour autant entrer dans la vénération. La valeur au combat – au mépris des considérations inutiles telles que le sexe ou l’âge -, le respect de l’adversaire, l’honneur dans la bataille, tout cela concordait avec certains principes de Romeo, sans aller plus en avant.

Romeo évolua avec aisance dans le milieu guerrier, s’attachant à survivre pendant les combats et faire son office, assez efficacement selon ses supérieurs. Il appréciait l’ambiance de franche camaraderie régnant au sein de l’armée, qui contrastait étonnamment avec les intrigues et les faux-semblants de la Cour. Même si la nourriture et le logement laissaient à désirer. Dans l’ensemble, Romeo était satisfait de son état.

Jusqu’au jour où il apprit par courrier le suicide de son père. Sanan Rosencrantz fut en effet éclaboussé par une obscure histoire de trafic d’esclaves au sein d’Amn, désigné par les Ménestrels et des preuves comme étant l’un des principaux négociant du marché des chairs. L’on trouva au manoir Rosencrantz des documents compromettants. Le père de Romeo ne supporta pas pareil déshonneur – que ce soit le fruit d’une machination ou non, Romeo ne croyait point une seconde à cette histoire, mais il ne pouvait prouver le contraire – et mit fin à ses jours.

Cette nouvelle jeta un voile sombre sur la vie de Romeo. Le scandale ne l’atteignit que peu, tous savaient que dès son adolescence, le jeune Rosencrantz était parti guerroyer. Néanmoins, Romeo venait de perdre sa seule famille – même Khalim s’était éteint quelques mois auparavant -, et l’opprobre fut telle que très vite la famille Rosencrantz – dont Romeo était le dernier représentant – fut très vite endettée.

Notre jeune homme eut congé de l’armée pendant plusieurs semaines, à peine le temps de rentrer et constater à quel point il était désargenté, forcé de vendre le manoir. Finalement, après avoir tout perdu sauf les bijoux de sa mère et une somme conséquente en or – bien que sans rapport avec la fortune première des Rosencrantz -, Romeo rejoignit le camp des soldats.

...

Duran n'a pas l'air de très bonne humeur, aujourd'hui.
Romeo tirait la grimace, tandis qu'il ramassait au sol son cimeterre.

- A quoi jouais-tu, bougre d'âne ?! Tu t'investis trop dans ta lame au point de t'y perdre. Il fallait au moins prévoir mon coup de pied - puisque manifestement, tu n'as pas la jugeote d'en lancer un toi-même - et bloquer avec ton bras. Cesse donc de ne penser que par ton cimeterre. Ta détermination est louable, mais prends garde de ne point trop faire de zèle. Il importe évidemment d'être en symbiose avec son arme, mais point de la manière dont je t'ai vu faire, petit sot ! Tu ne dois pas te fondre dans le métal jusqu'à en oublier ta chair, ralentissant ainsi tes mouvements et surtout te faisant perdre de vue les autres opportunités qui s'offrent à toi. Oh bien sûr, tu ne te rends compte de rien, mais cela m'offre autant de difficulté de t'affronter que de faire face à un troll cul-de-jatte ! Concentre-toi pour laisser l'énergie se répandre dans le métal mais n'oublie pas de bouger dans le même temps. Il faut ne faire qu'un avec ta lame, point te laisser absorber par elle !

Et la réprimande continua sur le même ton.

Cela faisait déjà deux années que Romeo apprenait au contact de Duran. Le maître d'armes vendait ses services à qui avait les moyens de se les offrir, assurant l'apprentissage du "Ki", cet énergie tout d'abord propres aux moines, mais qui pouvait s'étendre à qui le voulait bien, du moins dans une optique martiale.

Le jeune Rosencrantz avait tout perdu. Sa famille et l’honneur de son nom, et à présent l’armée – ou plutôt les mercenaires de choc qu’ils étaient devenus peu à peu – dans laquelle il évoluait. Ce fut simple, rapide, et un vrai massacre. La phalange de Romeo s’engagea sur un pont lorsqu’elle fut prise en tenaille par des archers cachés, secondés par une infanterie. Les elfes des bois en conflit avec à ce moment en étaient la cause - ces derniers appréciant très peu les passages d’hommes armés, cette race parasite, et le déboisement que ces profiteurs occasionnaient, mutilant leurs forêts -. Grissom succomba ce jour-là : la nage en harnois pardonnait rarement. Au moins, l'âme du défunt pourrait se consoler en se disant qu'il s'agissait là d’elfes et non d’orcs, et qu'il n'était pas mort de soif. Grissom mort, et bien d’autres.

Désemparé, presque désespéré, ayant perdu la majorité de ses amis, et malgré les aisselles exceptionnelles du commandant Bardora et la promesse d’une promotion, Romeo voulait fuir tout cela, sa vie détruite. C’est alors qu’il entendit parler d’un maître d’armes offrant ses enseignements à qui pouvait bien se les payer.
Quittant le campement par trop clairsemé qui prenait des allures de cimetière, désireux de s’engager dans une voie qui lui occuperait l’esprit, et en souvenir de Khalim, son premier professeur qui n’avait pas son égal dans le maniement du sabre – Rosencrantz commençait à se rendre compte pourquoi -, Romeo se mit en route.

Duma habitait une large bâtisse austère à dix lieues d'Amn, en pleine campagne et à l'orée des bois. Rosencrantz s’y rendit à cheval, portant dans un balluchon les restes de ses soldes et de l’héritage dilapidé de sa famille. Le vétéran, après examen de sa personne - et de sa bourse -, accepta de prendre sous son aile le jeune Romeo, heureux de trouver un peu de compagnie loquace, car le jeune homme lui inspirait confiance. Et pour cause, il y avait beaucoup de Grissom dans Duran, et Romeo n'eut aucun mal à apprivoiser son mentor, d'autant plus que son vieil ami lui manquait.

L'entraînement débuta, d'une manière déroutante pour l'apprenti. Il ne s'agissait plus de formation martiale à part entière - Romeo avait déjà accumulé nombre d'expériences, et sa silhouette musclée répondait parfaitement aux besoins de la guerre -, mais quelque chose de bien plus spirituel. Duran ne cessait de répéter qu'il fallait construire un lien entre son arme et soi-même. En l'occurrence, le cimeterre pour Romeo. Ce n'était pas l'arme en elle-même qui était importante, on pouvait la changer, mais il était plus aisé pour les débutants sur le chemin du "Ki" de garder pendant quelques années la même lame.

Le vieux mentor exigea tout d'abord à Romeo un soin absolu de son arme, tant et si bien que ce dernier passait souvent plusieurs heures à affûter sa lame, ou à réparer la moindre fêlure due aux entraînements. S’ensuivit l’apprentissage d’une succession de gestes amples censés ouvrir la voie du "Ki".

Dans le même temps, Romeo du s'entraîner à considérer son arme non point comme un outil de mort, mais une extension de soi-même, un prolongement de son être et de son âme. Seulement ainsi, selon Duran, il pourrait s'ouvrir au chemin de la Perfection. Car la perfection était l'objectif final. L'on ne maniait pas le « Ki » pour mieux combattre - du moins dans un premier temps -, mais pour parvenir à l'accomplissement de soi. Lorsque la symbiose entre la chair et le métal était complète – que l’on ressentait les bosses imperceptibles à l’œil nu d’une lame comme étant autant de pique dans sa peau, alors l'on pouvait tenter de d’accéder à la plénitude de la Danse d'Acier, à la grandeur des combats.

Romeo butait sur ce problème d'empathie avec son cimeterre. Tout s’était déroulé sans anicroche sérieuse jusque là, même sa première ouverture concrète au « Ki », qui lui valu une semaine de convalescence. Non point qu'il ne parvenait pas à << nouer ce foutu contact >>, comme disait Duran lors des premières séances, mais qu'il lui était encore difficile de réussir sans que cela requiert toute son attention. En d'autres termes, il fallait que cela se fasse de manière plus naturelle.

Pourtant, Romeo était présentement bien loin de telles considérations. Le sermon de Duran - un parmi tant d'autres, pourtant - lui montait à la tête, et il sentait la frustration des échecs passés ressurgir.

- Mais enfin, jusqu'où cela va me mener ?! Vous me répétez sans cesse les mêmes choses, tant et si bien que j'en ai des migraines récurrentes, et je n'en vois toujours pas le début d'une utilité quelconque !

Duran s'arrêta net dans sa réprimande, fixant le jeune homme d'un regard intense. Puis, hochant imperceptiblement la tête, comme à lui-même, il se détourna de Romeo pour s'avancer en direction de la lisière de la forêt, non loin.

- Regarde bien, ce sera la première et la dernière fois.

Romeo suivit son maître des yeux, le voyant s'arrêter devant un arbre au tronc massif, sans comprendre. D'un geste vif, Duran sortit deux poignards, l'un surgissant de sa botte, et l'autre de l'arrière de la ceinture. Depuis tout ce temps, Romeo n'avait jamais imaginé qu'ils se trouvaient là, cachés comme ils étaient. La seule arme que Romeo lui connut fut une épée longue quelque peu rouillée, que son mentor utilisait pour lui montrer quelques gestes techniques.
Debout devant l'arbre, Duran poussa un bref et puissant cri de guerre, tandis qu'il tourna sur lui-même pour asséner successivement deux coups d'une puissance inouïe à l'écorce. Passé ce moment aussi rapide que violent, un léger silence s'installa, bientôt rompu par le bruit de l'arbre s'échouant sur le sol, derrière Duran.
Ce dernier rangea ses lames, tout en s'avançant tranquillement vers Romeo, lui jetant un regard brûlant.

- Euh... Ne faire qu'un avec son arme, tout en restant alerte et mobile, c'est bien ça ?

...

Le temps passa, et au terme de d’une dernière année, Romeo parvint à franchir le cap et à user de l'énergie à volonté - un certain nombre de fois par jour - sans perdre de ses autres facultés.

- Très bien, Romeo. Maintenant, je pourrai dire sans rougir de honte que tu as été mon disciple, non pas que tu n'ais atteint au mieux ne serait-ce que le dixième de ma maîtrise *sourire amusé*
- C'est trop d'honneur, messire Duran *clin d'oeil de connivence*
- Quel ton pompeux, ma parole ! Enfin soit, comme tu l'as déjà deviné, ton apprentissage ici se termine, avec succès - qui l'eut cru, certainement pas moi *s'ensuivit un "Ah ah ah" moqueur et hilare à la fois* -. Mais ne crois pas que c'est la fin, bien au contraire. Ecoute bien ce que je vais te dire : Tu as passé trois années en ermite ici pour apprendre à utiliser le « Ki », en t'appuyant sur tes anciennes connaissances martiales. A présent, tu dois découvrir les techniques qui sont propres à ton arme et à l'énergie que tu sais à présent y associer. Et là, je ne te suis de plus aucune utilité, il y a autant de différences entre mes dagues et ton cimeterre qu'entre un poisson et un oiseau. Ne me reste plus qu'à te souhaiter bonne chance, mon petit.

Les adieux se firent rapidement, dans une ambiance très familiale, car Romeo n'avait pas que tisser des liens avec son arme, mais aussi avec son mentor. Son ancien mentor, à présent. Le jeune Rosencrantz partit le lendemain du discours.

…

Sorti de sa bulle, Romeo, devenu adulte, dut faire face à ses vieux démons. Il était désargenté, mais comptais bien chance cette situation fort malheureuse. De plus, les années passées sur le chemin de la Grande Danse, comme disait Duma, n’avait pas empêché Rosencrantz de ruminer sa haine contre les ménestrels et les elfes, ces êtres puants, secrets et arrogants qui étaient responsables de la perte de tout ce qu’il possédait alors.

Mais à présent, il y avait le chemin de la perfection. Ce dernier l’emplissait d’aise, mais ne suffisait pas. Le contentement de l’âme ne saurait cacher les blessures du cœur. Et de ces blessures coulaient du fiel, de la fureur irraisonnable – irraisonnée - envers les Ménestrels et les Elfes, et Romeo se sentait animé d’une aversion farouche à leur encontre.

Rosencrantz retourna au camp de Bardora. Ce dernier était en poste, atteignant maintenant la quarantaine, âge honorable dans le milieu. Le commandant le reçu avec grand plaisir, plus encore une fois que Romeo lui conta les années passées à l’apprentissage. Ainsi, le jeune soldat doué du départ, qu’il avait vu devenir progressivement un guerrier chevronné, avait franchit la limite séparant les vétérans et des maîtres.

Bardora plaça rapidement Romeo à la tête d’une petite unité, ce qui contenta tout le monde. Romeo se révéla bon chef, bien que meilleur combattant, et sa hargne des elfes – nombreux dans la région, les conflits ne manquant pas – l’encourageait à faire montre de ses talents. Ces derniers s’accroissaient, tandis que les batailles défilaient. Le jeune maître employait avec de plus en plus d'aisance le "Ki", s'attachant à découvrir de nouvelles bottes, des feintes originales et surprenante.

La chose n'était guère aisée, mais Romeo fournissait un effort constant et ininterrompu, par des séances d'entraînement ponctuelles et la recherche perpétuelle de nouveaux partenaires - talentueux de préférence -. De ces exercices quotidien, Rosencrantz en ressentait de grands bienfaits. Ils lui permettaient de s'accomplir, de marcher chaque jour un peu plus sur la voie de la Perfection, sachant bien qu'il ne pourrait jamais l'atteindre, à peine osait-il espèrer la frôler du bout des doigts - du bout de sa lame - un jour. Être sur le front constituait aussi un terrain d'entraînement, en moins ludique.

Les choses auraient pu se tasser, au demeurant. Rosencrantz aurait pu continuer sa carrière, monter en grade, tout en continuant à se parfaire dans l’Art de la Danse d’Acier, oubliant peu à peu son douloureux passé et sa colère sourde. Ce fut le cas pendant cinq printemps. Jusqu’à Merlose.

Depuis quelques mois, la compagnie – symbole de sa réussite – de Rosencrantz comptait une nouvelle venue. Il s’agissait d’une jeune demi-elfe d’une vingtaine d’années, habile à la rapière et disciplinée, disposant surtout d’assez de faroucherie pour survivre dans un milieu très masculin. Elle n’avait aucun charme particulier mais ne manquait ni d’attribut ni de bonne volonté, l’air toujours déterminé, la sourire aux lèvres.

Ce qui devait arriver arriva. Romeo en tomba éperdument amoureux, et son sentiment n’était pas loin d’être réciproque du côté de la jouvencelle. Le fait que la demoiselle ait du sang elfique ne dérangeait pas réellement Rosencrantz. Son hostilité envers les elfes s’était adoucie au fil des années, reléguée progressivement au second plan par les batailles, le commandement, l’entraînement et la Voie de la Perfection. Et puis, ce n’était pas sa faute si elle n’était qu’à moitié humaine.

Une idylle s’installa, sous le regard amusé des soldats, blaguant allègrement les relations entre leur chef et la jeune femme – s’abstenant sagement toutefois de le dire en présence de l’intéressé -, jusqu’au jour où celle-ci tenta de tuer Romeo, à la suite de leur première nuit d’amour – comme quoi, les commentaires grivois des subordonnés étaient parfaitement infondés, ce qui en aurait étonné plus d’un -.

Ironiquement, ce qui sauva la vie de Rosencrantz fut son ancienne animosité à l’égard des oreilles pointues. En effet, après une nuit de délices – bien entendu, Romeo eut l’occasion de tester les charmes des dames lorsqu’il traversait une cité, ou retournait, plus rarement, à Amn, que ce soit en jouant de son pouvoir de séduction, point mirobolant mais loin d’être négligeable, de son rang, de son argent ou deux trois -, notre héros se tourmentait à propos de cette union. Il n’y avait rien qui empêcha cela, si ce n’est le sang elfique. Mais c’était peut-être l’occasion d’enterrer définitivement cette partie de son passé, et de se tourner vers l’avenir.

Romeo était au point de se concilier avec son passé – aboutissement d’un processus qui mit plusieurs heures, pendant lesquelles il ne dormit pas mais ne fit aucun bruit pour ne point éveiller Merlose -, lorsqu’il entendit un froissement de draps à ses côtés. Il eut tout juste le temps de se retourner pour voir Merlose, dans la lueur de la lune que les volets laissaient passer, s’abaisser et saisir sa fine rapière. Romeo, par un vieux réflexe guerrier, recula vivement, mais point assez pour éviter le coup vif que son amante lui porta, provoquant une estafilade profonde au côté gauche de son visage. Borgne mais point aveugle – et entièrement nu -, Rosencrantz se jeta sur son cimeterre sagement posé non loin de l’oreiller.

S’ensuivit une brève lutte pendant laquelle Romeo projeta son coussin sur Merlose – nue elle aussi, et désemparée de ne pas avoir tué son homme par surprise – et asséna un coup ferme des deux mains sur la fine lame de la femme, la désarmant ainsi.

Pris dans un tourbillon d’émotions contradictoires, Rosencrantz la somma vivement de s’expliquer, et avec grande célérité, tout retard risquant de se sanctionner par la perte d’un membre ou deux membres.
En pleurs mais l’œil sombre, Merlose lui avoua entre deux sanglots et rictus rageur qu’elle comptait venger son demi-fère – elfe pur sang de son état – qu’il avait occis lors d’une bataille quelconque, deux saisons plus tôt. Elle s’était engagée dans l’armée dans ce seul but, confiante en ces capacités comme en ces charmes.

Romeo, désabusé et sonné par ces révélations, relâcha un instant Merlose. Celle-ci voulut se réfugier dans un coin de la pièce, terrorisé par la mine sombre de sa victime. Elle atteignit son but, mais avec un cimeterre en travers du corps. La dernière chose qu’elle vit en ce monde, tandis qu’elle se retournait doucement en gémissant, fut celle d’un homme au comble du désespoir et au bord de la folie.

La suite resta à jamais brumeuse dans l’esprit de Romeo. Il se souvint de son rire dément et hystérique, et de l’éclair de lucidité qui s’ensuivit, lui enjoignant de s’enfuir au plus vite. Bien sûr, il pouvait toujours mentir, raconter que c’était de la légitime défense, mais il n’avait jamais été grand bluffeur, ni ne voulait d’un cas de conscience, même infime, supplémentaire – un comble ! -. De plus, les connaisseurs sauraient reconnaître de quel côté s’était enfoncé la lame, et un coup dans le dos laissait libre cours à la suspicion.

Le capitaine Rosencrantz prit donc un congé anticipé, en pleine nuit et sans demander son reste, et cela peu de temps avant que l’alerte ne fut donnée.

Ainsi donc, le sang avait pris le dessus. Rien ne pouvait arriver de bon avec les elfes, avec leur air suffisant et leur propension à croire qu’ils étaient toujours dans le droit chemin. Sa vie se trouvait bousculer encore une fois, et de manière définitive, cette fois. Il n’avait plus d’endroit où aller. Seul lui restait Son Art, la Pureté du Métal, et une haine froide, sourde, cachant tant bien que mal la douleur, envers tous les « bouffeurs d’écorce », selon l’expression d’un soldat sous ses ordres.

Il n’avait plus qu’à se reconstruire une vie, en doutant réellement y arriver. Romeo erra pendant une année, se dévouant plus encore à la cause de sa Lame – chose qu’il n’aurait pas cru possible -, louant parfois ses services pour gagner de quoi survivre. Ses déplacement inorganisés l’amenèrent progressivement au Nord, jusqu’à atteindre la région du Val de Bise.

Romeo Rosencrantz avait conservé pendant plusieurs années son cimeterre, lors des années d’ouverture à la voie du « Ki », car avoir la même lame aidait l’apprenti à mieux la ressentir. Par la suite, il fut amené plusieurs fois à changer de cimeterre, parfois à regret, mais sans s’en préoccuper réellement. Qu’importe l’arme actuelle, il suffisait d’en prendre soin et de s’allier à elle dans la Danse d’Acier.

Certaines victimes d’une corruption ne peuvent – dès lors qu’elles ont été atteintes – se défaire du mal qui les abat, et ressentent même pour celui-ci un attachement malsain, bien que compréhensible, car l’on ferait n’importe quoi pour se soustraire à la douleur.

De même, Rosencrantz porta dès lors le même cimeterre, l’utilisant souvent avec parcimonie, mais parfois sans y penser. A sa garde était gravé le nom complet : Merlose « Liss di Naneth Sabacca».

Un jour, dans son enfance, Romeo demanda à Khalim comment son père vivait la disparition de sa femme, et celui-ci lui répondu ces quatre mots, en nomade, avant de les lui traduire : - « Liss di Naneth Sabacca », voyez-vous, jeune maître, désigne « Celui qui souffre au delà des larmes » .

Je te passe en évolutif pour Mda, continue à écrire ses entrainements et le raffermissement de son lien avec son arme.

Un homme assit dans sa luxueuse suite de l’auberge de la Plume Noire, en Lorgol, rédige un cahier d’une écriture un peu maladroite – par manque de pratique - mais non moins lisible et claire.

Nouvel Arrivant.

« J’ai fuis ma vie, je l’ai fuis et je ne veux plus en entendre parler. L’harmonie que je commençais tout juste à ressentir avec le cimeterre semble s’être rompue. Peut-être est-ce la faute à Merlose – je sens en permanence son poids au côté droit de ma taille, un contact rassurant -, peut-être pas. Toujours est-il que je ne compte pas en rester là, dussé-je tout reprendre à zéro. »


(23/08/07) Arrivée en Lorgol.

« Visitant les cités majeures du Val de Bise, je suis arrivé en terre Lorgolite. Un climat froid, et des gens durs, mais rien qui ne diffère vraiment des milieux guerriers d’où je suis issu, hormis la température.

Très vite, me voilà quémandant aux gens du coin où je pourrai trouver un endroit susceptible de m’accueillir pour mon entraînement. Je sens que Merlose s’impatiente, agacée de rester trop longtemps au fourreau.

C’est alors que je fis la rencontre de dame Davina Vol’Art, une jeune guerrière aux traits étranges mais non dénués de charme. Peu probable qu’elle soit native des environs, ce qui nous fait un point commun. Nouvelle surprise, après quelques mots échangés, dame Vol’Art me conseilla l’arène – seul endroit de la ville où l’on puis tirer arme au clair en toute légalité – et surenchérit en me proposant un duel amical.

Je ne vais pas ici détailler sa remarquable technique, toujours est-il que je m’en tirai de justesse, quelques mèches raccourcies quand la lame de son katana me frôla la tête. Au moins, je me souviendrai de cette botte.

La suite fut moins appréciable. Un Sieur, Commandeur de son état, j’ignore son nom, assista à notre joute et me traita de « jeunot », un terme quelque peu discourtois. Cela se finit en duel de premier sang, à l’arène, bien que je ne l’ai point voulu, fatigué comme je l’étais. Et là, je goûta avec amertume le sol.

Enfin, l’expérience eut du bon, j’avais pu faire la rencontre de deux fines lames, bien que le style de ce Commandeur soit plus brutal, et au final – j’en suis persuadé – bien moins efficace.

Je suis actuellement dans ma suite, et à défaut de meilleur endroit, j’ai dégagé le plus d’espace possible pour effectuer quelques exercices avec Merlose. Espérons que je trouve un terrain de prédilection, ces deux combats où je suis ressorti vaincu m’ont grandement instruit. Je devrai peut-être ressentir de la honte de mes défaites devant nombre de badauds, mais il y a plus important que l’honneur de la victoire, lorsqu’on débute à peine sur le chemin de la Perfection – que l’on ne finit jamais, mais là n’est pas la question -.

J’appris aussi qu’un tournoi aurait lieu dans une lune, et je compte bien d’ici là parvenir au terme de ma formation, entamée avec ardeur aux côté de Duran, mon ancien maître de Ki. »

(24/08/07, après-midi) Chanteplume, Aubépine et Lanael.

« Je viens de perdre plusieurs milliers de pièces d’or auprès du forgeron de Lorgol. Un investissement coûteux mais nécessaire : Merlose avait une entaille. Elle n’était point visible, mais la déformation que l’on sent en y passant le doigt fut éloquente. Après avoir passé plusieurs heures à marchander puis surveiller le forgeron – qui est au final, quelqu’un de capable -, je me suis dirigé vers le port.

Me voilà à Luskan, toujours à la recherche d’un lieu propice à l’entraînement.

Abordant un halfelin à l’allure joviale, je lui demandais renseignement. Je ne mettais pas trompé, découvrant en lui une personne serviable et de premier abord au cœur franc – notant aussi une certaine réticence aux formes par trop rigides de la société -. Messire Chanteplume de son nom, Barde de son état, entreprit de me porter secours, ce dont je lui suis reconnaissant.

Nous voici donc au Bosquet Est, devant le dojo de l’Aubépine. A l’intérieur, nous nous sommes pourvus d’armes d’entraînement.

Non content d’être de bonne conversation, messire Chanteplume se révéla aussi un partenaire d’entraînement de valeur. Je sentais néanmoins qu’il me manquait quelque chose. Je ne faisais qu’entretenir mon corps et pousser un peu plus mes techniques, il me fallait à présent aborder de nouveau horizons martiaux, et me concentrer pour m’étendre à ma lame.

J’en étais à de telles pensées, après quelques passes avec messire Chanteplume quand deux messires entrèrent. D’après ce que j’appris, un Tempusien et un certain sieur Lanael. Ce dernier, en tenue légère et pourvu d’une épée à deux mains d’entraînement, attira mon attention et je lui proposait – sourire aux lèvres – une joute amicale, qui sembla accepter de bon cœur.

Hélas, ses coups furent rudes, et je suis persuadé qu’il ne l’avait point voulu autant. Sa maîtrise est remarquable, j’y ai senti un peu de Vol’Art, cette même manière de tenir son arme et de se mouvoir en parfaite harmonie avec. Je ne l’ai point dis, mais je suis persuadé qu’il s’agissait la du « Ki ».

C’est toujours un honneur de rencontrer un Maître, mais la discussion n’eut point lieu après le combat, à moitié blessé comme je l’étais. Tirant ma révérence à ces messires, j’entrepris de me revêtir et de retourner en Lorgol, boitillant. Messire Chanteplume ne put m’accompagner, sa Muse lui chuchotant à l’oreille, il ne voulait manquer de rédiger quelques vers d’importance – ce dont je ne lui tiens aucunement rigueur -.

Le style à l’épée à deux mains de Lanael me reste en mémoire. Il manie son arme pourtant lourde avec une facilité déconcertant, profitant même à une occasion du poids de sa lame pour se laisser entraîner dans un mouvement ample que je n’ai pu qu’à moitié parer.»

(24/08/07, soirée) L’entraînement Vol’Art.

« Décidément, un joli brin de femme, bien que je n’ai guère le temps d’y penser sur le moment.

Atteignant enfin Lorgol après un trajet particulièrement houleux – une tempête éclata en mer -, je rejoignit l’auberge de la Plume Noire et ma suite. Sitôt la porte ouverte, je tombait nez à nez avec dame Vol’Art. Surpris, car c’était censé être ma suite, je découvrit plus tard que ce brave tavernier s’était fourvoyé dès le départ, et que je me trouvais dans celle d’en face.

La Législatrice – j’oublie parfois son rang, car elle ne fait rien pour me le rappeler – ne sembla pas s’en offusquer, et me proposa même un thé.

A la vérité, ce thé était un piège, car sitôt installés dans la salle commune, elle entreprit de me piquer au vif et de me conduire une nouvelle fois à l’arène, pour un autre entraînement, malgré la fatigue de mon corps et le fait que je fut blessé par messire Lanael.

Qu’à cela ne tienne, nous nous mirent en route. Sitôt arrivé et les salutations mutuelles faites, dame Vol’Art se mit en garde et m’attaqua avec fougue. J’eus les plus grandes peines du monde à contenir son assaut.

Ce n’était que le commencement, tour à tour, elle m’engageait ou me provoquait pour l’attaquer, me relevant brutalement à chaque fois que j’échouais au sol – c’est-à-dire bien souvent -. Loquace au début, je fus bien vite pris de mutisme, exténué comme je l’étais, économisant mon souffle et me concentrant autant que faire se peut possible sur Davina.

Je l’avais déjà deviné lors de notre première rencontre, mais nos passes confirmèrent le style fluide et gracieux de dame Vol’Art et de son katana. J’enviais une telle communion avec la lame, m’efforçant d’établir un pareil contact avec Merlose, l’extension de mon bras.

La leçon continua, moi feintant, cherchant une faille et me fendant dans des coups vastes à l’encontre de dame Davina. Cette dernière ne faisait pas que ce répondre, et ses ripostes m’ont fait goûter plus d’une fois le gravier gelé. Tout en combattant, elle m’expliquait d’un ton mesuré – la chose n’était pas aisée, même pour elle – mes erreurs, le trop-plein de mouvements inutiles de ma part, promouvant l’économie des mouvements, d’une part pour moins se fatiguer, de l’autre pour être plus à même d’établir le contact avec son arme, de se lier à elle par le « Ki », l’acceptant comme une partie intégrante de son corps, et enfin de frôler la Perfection.

Ma technique était bonne, me dit-elle, mais il me fallait encore parfaire mes bottes, et apprendre de nouveaux arcanes martiaux. Ça ne serait que par ce biais-là que je serai apte à m’ouvrir au « Ki » et entrer en symbiose avec Merlose.

Ces mots resteront gravés dans ma mémoire pendant bien longtemps, la voix tranchante de Davina me dominant, son sabre planté à côté de ma tête, tandis que j’étais au sol à moitié mort de fatigue – et des coups qu’elle me porta -. La suite demeure nébuleuse dans mon esprit. Je me souviens m’être quasiment fait traîner jusqu’à ma suite, avoir échangé quelques mots avec ma maîtresse d’armes avant de sombrer dans un lourd sommeil.

A mon réveil, j’avais quitté mon harnois et me trouvais en peignoir, confortablement installé dans mon lit. Dame Vol’Art avait du envoyer des servants, peut-être son esclave personnelle.

Je viens de finir de nettoyer Merlose, dont le tranchant – loué en soit le Panthéon – est encore intact. Mon bras gauche est en feu, chaque mouvement de sa part m’arrache une grimace, et mon corps tout entier grince de courbatures diverses.

Davina ne m’a pas épargné, et je n’en attendais pas moins. Plus encore, je me rends compte que ces douleurs sont un bien maigre prix à payer pour profiter de ses enseignements, et - quelque part - de sa compagnie. Son extrême parcimonie dans ses mouvements et son visage souvent stoïque cache peut-être une certaine timidité. Le temps aidant, j’aurai peut-être de quoi sourire en la voyant mal à l’aise, dans une situation de la vie imprévue, mais certainement pas sur un champ de bataille.

Je vais rejoindre ma tortionnaire, et si je ne la trouve pas, il ne me restera qu’à faire quelques exercices en compagnie de Merlose uniquement. Comme supplicié, je dois avouer que me voilà pas mal loti. »

(25/08/07, début de soirée) Le froid et le chaud.

« Heureuse rencontre – bien que peu surprenante - que celle de dame Vol’Art dans les rues de Lorgol. La chose est officialisée entre nous, désormais, car la voici mon Maître d’Armes.

Très vite, dans un style tout Davinien, elle me conduisit hors des murs de la cité, à la campagne. La neige recouvrait les toits des quelques chaumières sans lumière que j’apercevais, tandis que je sentais la morsure du froid dans tout mon corps. Au demeurant, j’ai cru apercevoir dame Vol’Art – « Maître » est bien moins plaisant à écrire qu’à dire – frissonner de même. Au moins, elle est capable de ressentir des émotions humaines.

Enfin, plutôt que de me répandre en médisances à son sujet – un moyen inconscient, sans doute, de me venger des traitements qu’elle me fait subir -, entrons dans le vif du sujet.

L’avantage du terrain – ainsi que du climat – était que s’arrêter de s’entraîner fut presque aussi douloureux que de continuer, tant le froid était intense. Mon bras gauche n’était encore qu’un poids mort m’élançant sans arrêt, m’arrachant parfois une grimace de douleur, mais qu’importe.

Dame Vol’Art me présenta les six points d’attaque du corps, à savoir le bras droit, le gauche, la tête, le dos, la jambe droite et gauche. Je du lui montrer les manières de parer et d’attaquer pour chacun de ces points – sauf le dos, indéfendable si l’on ne se tournait point, naturellement -, acceptant ces critiques, puis me corrigeant dans une répétition exténuante des mouvements, sous l’œil inquisiteur de mon Maître.

Il est vrai que je possédais encore quelques mauvaises habitudes de mêlée, privilégiant trop souvent la force brute au détriment de la souplesse, moins fatigante et parfois même plus sauvage, en retournant la puissance du coup adverse contre son porteur. Quoiqu’il en soit, je commence à me sentir à l’aise avec ce genre de choses, car à l’heure où j’écris ces mots, j’eus tout le temps de m’entraîner seul.

De plus en plus fluide avec Merlose – et même avec mon arme d’entraînement -, j’entrevois le secret de mon Maître dans ses mouvements, et par-là même celui de tous les utilisateurs du « Ki ». Mon cimeterre n’est – ne devrait pas être – pas un outil de mort, je n’assène point des coups avec, je ne me protège point avec. Mon corps n’accompagne chaque attaque, chaque défense : j’incarne cette attaque, je suis ma défense. Ces principes commencent à montrer un début d’application, ce dont je ne manque pas d’être secrètement fier. Mais il reste encore du chemin à parcourir, je dois maîtriser les arcanes de ma lame, en faire mon prolongement en tout instant et à tout occasion. Après plusieurs heures, alors que mes jambes s’entrechoquaient de froid et d’harassement, elle m’emmena dans un tout autre endroit, où j’eus le loisir d’en apprendre plus sur le « Ki », et aussi sur moi.

Après le froid vint le chaud. A ma grande surprise, mon Maître me reconduisit à l’auberge de la Plume Noire, me donnant une demi-heure pour me changer. Direction, les bains.
Me dévêtir de mes plaques fut un travail de longue haleine, tant je me trouvais dans un état avancé de fatigue. Mais je fut là à l’heure dite, précisément pour voir dame Vol’Art s’enfoncer doucement dans l’eau chaude. J’eus tôt fait de la rejoindre, la mine comblée par le bienfait que me procurait un environnement relaxant comme celui-ci, mais reprenant bien vite mon sérieux sous le regard déterminé de mon Maître.

Epuisé, luttant contre l’envie pernicieuse de m’assoupir, je fus bien vite dégrisé par les propos de dame Vol’Art, du moins assez pour rester éveillé et attentif.

« Le moine apprend à tirer le Ki pour en user avec son corps ; se faisant, il devient comme une arme, extrêmement résistant. Mais pour arriver à user du Ki de cette façon, il faut maîtriser son corps de façon drastique… D’où le recourt aux arts martiaux, l’usage n’étant pas nécessairement le combat. C’est une volonté d’accomplissement de soi.

Pour nous autres, c’est autrement plus compliqué, car il s’agit d’insuffler du Ki à l’intérieur de ce qui est dans l’absolu un corps étranger. La tâche est encore plus difficile. Mais par la technique, le Maître apprend toutes les subtilités de son arme, tous les usages possibles sans la moindre exception. En plus de maîtriser son corps…

Lorsque vous posséderez la technique de votre arme dans sa globalité, alors seulement vous pourrez la considérer comme un prolongement. Car vous la déplacerez comme vous déplacez vos doigts, sans y réfléchir.

Mais il y a cependant une condition de plus, si vous voulez réellement user de votre arme et lui faire déployer le meilleur… N’importe quel nasique pourrait apprendre tous les mouvements d’une arme, mais la différence se trouve dans le fait que nous, nous manions notre arme avec une conviction. Des valeurs, voilà ce qui est aussi une clef. Celui qui veut le Ki uniquement par caprice, n’en sera jamais capable, il faut protéger les valeurs qui sont nôtres. Et être prêt à payer le prix fort pour cela. »

En bon disciple, j’acquiesçais, réfléchissant au sens de son discours.

« En d’autres termes, nous sommes comme des enfants qui apprennent à utiliser leurs membres, à la différence prêt que le membre en question est notre arme. Reste évidemment la conviction qui est nôtre, car l’on ne déploie par le Ki par caprice ou luxure, mais par conviction, c’est cela, Maître ? »

Son hochement de tête approbateur, suivi du « Belle métaphore. » m’apprit que j’avais touché juste.

La suite fut moins brillante, et il me coûte encore d’en parler à travers l’encre et la plume. Dans un enchaînement somme toute logique de la conversation, dame Vol’Art me demanda mes convictions. J’ai quelques principes, bien sûr, mais…

*l’écriture s’arrête ici*

(25/08/07, la nuit) Merlose.

*le récit interrompu semble reprendre, la courbure des lettres est un peu plus appuyée, comme si la plume était tenue par une main fébrile*

J’ai rêvé de Merlose, cette nuit, me réveillant en sursaut et en sueur. L’aurore est encore loin, mais je sens que je n’arriverai plus à trouver le sommeil. Elle me tuait pour de bon, cette fois-ci, ne se contentant pas d’une balafre au côté gauche de mon visage. Ce n’était point non plus sa rapière, mais mon cimeterre.

En ouvrant les yeux, mon regard s’est instantanément posé sur la forme incertaine de ma lame, dans l’obscurité ambiante. L’arme était dans son fourreau, mais j’eus l’impression que du sang en coulait abondamment. Bien entendu, une fois la bougie allumée en hâte, il n’en était rien.

Je ne veux plus y penser, et pourtant cela s’impose sans cesse à moi. Cette nuit-là…

*nouvelle interruption*

…

*L’écriture recommence, de manière plus fluide, mais quelques tâches de vin se font voir sur le papier*

Le temps semble s’étirer, tandis que je mijote dans ma chambre, surveillant Merlose, et que du ciel ne perce pas encore le premier rayon du soleil.

Mes convictions… Ma réaction fut assez brusque, je m’en rends compte maintenant, et j’espère que dame Vol’Art ne s’offusqua pas de ma soudaine attitude offusquée, sur la défensive. Apparemment ce ne fut point le cas, mais comment percevoir quoi que ce soit sur son visage atone ? La discussion s’est arrêtée là, néanmoins.

A la vérité, c’est un point sensible – je m’en rends compte à présent – qu’elle aborda. J’ai tout perdu, à deux reprises, et la dernière fois fut éminemment douloureuse. Tout perdu sauf le chemin de la Perfection par la Danse d’Acier.

Bref, point un idéal comme on en conçoit un. Je me demande si ma venue en ces terres et mon apprentissage n’est qu’une fuite en avant. Mon passé me rattrape, où que j’aille.

Merlose semble me regarder d’un mauvais œil. J’ai envie de la manier, de sentir son pommeau entre ma main, d’entendre le sifflement de son tranchant dans l’air. « Liss di Naneth Sabacca » m’est néfaste, je le sais, à présent, tout comme je sais que je n’ai pour le moment pas la force de m’en séparer.

Je parcours le chemin des Portes du Ki – c’est mon net sentiment -, mais il me faudra néanmoins savoir pourquoi j’avance ainsi. Ce n’est pas un caprice – au moins cela -, je ne conçoit pas d’exister sans progresser sur le chemin de l’Art, car je sens que la paix de mon coeur est inextricablement lié à l’accomplissement de mon âme.

Retrouver pied en ces terres inconnues, m’aviser de ce que je pourrai y faire, trouver une juste cause qui mérite que l’on se sacrifie pour elle, et, enfin, faire la paix avec ce passé que je fuis ; Autant de choses qui ne peuvent se faire sans marcher sur la voie de la Danse d’Acier. Autant de choses qui sont nécessaires à cette dernière. Le chemin de ma vie et la route du Ki sont indissociables.

Et je parcourrai ce sentier en compagnie de Merlose. Car j’ai le sentiment d’être dans une rivière, risquant de me noyer ; et plutôt que de nager directement vers la surface, je dois toucher le fond, afin d’y prendre appui et de m’élancer à nouveau. Davina Vol’Art m’est précieuse en ce sens, j’apprends beaucoup à son contact, autant sur le Ki que sur des sentiments humains que j’avais oublié pendant mon année d’errance.

A ce propos, j’ai remarqué la longueur démesurée de ses cheveux, tandis qu’elle ressortait de l’eau. Dénoués, ils lui arrivent jusqu’au bas du dos, occultant en partie la vue des courbes de ses hanches, et de manière générale, sa silhouette fine mais musclée. Combien d’heures doit-elle passer à les sécher ? »

(27/08/07, l’après-midi) La forgeronne.

*le style de l’écriture s’améliore peu à peu*

Arya Lyonar, forgeronne de son état. Fait troublant – et qui a suscité en moi une vive colère la première fois que je l’ai rencontré, au loin – dans ses veines se mêlent sang humain et souillure elfique.

Qu’importe, j’apprécie l’ironie de l’Histoire. Je n’ai rien ressenti sur Merlose, que ce soit à l’examen visuel ou en la caressant du bout des doigts. Néanmoins, je ne prête point dans l’art de la forge, aussi me fallait-il m’assurer de la bonne tenue de mon arme, par une personne confirmée.

Dame Lyonar s’en occupa fort bien, au demeurant, ce en quoi je lui suis redevable. Dans le cas contraire… Hé bien, Merlose n’en était pas à son coup d’essai, n’est-ce pas ?

Quoiqu’il en soit, le tranchant de ma lame est encore plus satisfaisant qu’à l’accoutumé. Je m’en vais aller le tester sur des ogres - on en signale au Nord des forêts luskaniennes -.

(27/08/07, la soirée) Bremen, la Championne et dame Davina.

*les lettres sont maladroites, les mots bancals, comme si l’auteur avait les doigts gelés*

L’apprentissage se fait aussi par le voyage. Après m’être exercé le bras et la lame sur les demi géants - j’en parle comme si la chose était simple, m’étonnant moi-même de mes progrès -, j’entrepris de visiter plus en avant les différentes cités du Val de Bise, et le hasard – ou une inspiration soudaine – me poussa vers Bremen.

Sur place, je fis la surprenante rencontre de la Championne des lieux, au nom encore inconnu, mais qu’importe. Salutations courtoises, début de conversation prenant, j’eu tôt fait de l’inviter à l’auberge, continuant ainsi notre discussion au chaud et devant le cru local.

Ce fut l’occasion pour moi d’apprendre beaucoup sur mon Maître. En effet, j’ignorai que dame Vol’Art, en plus d’être Législatrice dans tout l’Empire, exerçait la fonction de conseillère de Bremen, dirigé par monseigneur Athanase.

Lorsqu’on parle du loup – l’expression est encore trop douce quand il s’agit d’elle -, dame Vol’Art se présenta au pas de l’auberge. Quelques instants plus tard, je laissais mes deux supérieures – Mon Maître et une Championne, rien que cela ! -, préférant aller m’entraîner en dehors de la cité.

Je sens encore l’étreinte glacée de l’hiver pendant que j’écris ces mots. Me voilà torse nu dans la neige, en pleine nuit, Merlose à la main, une torche plantée au milieu. Le froid était meurtrier, mais paradoxalement, il m'aida à trouver ma concentration.

Tandis que je virevoltait autour du flambeau, mon ombre dansant sur le sol, j’eu une impression d’irréalité. Le manteau de Shar tout étendu, les nuages cachant la lune (ou les lunes ?), l’obscurité ambiante ne me laissant rien voir d’autre que l’infime lueur de ma torche, étincelle perdue dans un monde de noirceur. Rapidement, après une série d'exercices, je commençais à me sentir étrangement à l’aise, ressentant chaque flocon de neige échouant et fondant sur ma peau nue, attentif à la flamme vacillante à mes pieds, tandis que j’en faisais le tour, frappant, feintant, enchaînant les bottes.

Ce fut comme un moment d’intimité avec Merlose, que je vécu de manière, la manipulant avec une sensibilité que je ne m’étais jamais connue. J’eu le sentiment net d’avoir franchi un nouveau pallier dans l’apprentissage du Ki. Ce frisson perdura, même lorsque dame Vol’Art se joignit à moi, dans un combat fictif destiné à juger de mes progrès, qu’elle annonça étonnants et bienvenus.

Ensuite, mon corps à moitié gelé, je dus me retirer à l’auberge, tandis que mon Maître s’en alla dans les montagnes s’entraîner à son tour. Après m’être suffisamment réchauffé et vêtu, j’ai entrepris de chercher dame Davina aux alentours de Bremen, sans succès. Très vite, je suis retourné dans le chaud, m’attelant à la présente écriture, tandis que j’attends son retour.

Merlose est à mes côtés, sortie de son fourreau. Je lui adresse fréquemment un regard, tâchant de me remémorer au mieux le sentiment d’exaltation que je ressentis, tandis que nous étions seuls au monde, elle et moi, au milieu d’un vide sans nom, échoués sur une épave dérivant dans l'infini : une torche fouettée par le vent.

(27/08/07, la nuit) Perspectives.

Commençons par le moins important. En compagnie de mon Maître – la Législatrice -, nous nous rendîmes à Targos pour assister à l’exécution d’un Beshabarite dont j’ignore jusqu’au nom. Bien que je sois redevable au Grand Bourreau de m’avoir offert l’insigne honneur de participer au supplice par le fouet, ce genre de cérémonie a le don de me lasser au plus haut point.

Néanmoins, je comprends aisément le besoin qu’à la foule de voir du spectacle, et l’utilité de telles démonstrations sur le peuple, qui font réfléchir à deux fois ceux qui seraient tentés de violer la loi. Je puis même concevoir que certain éprouvent du plaisir dans la douleur d’autrui – cela m’est déjà arrivé, et se produira encore -.

Il n’en reste pas moins que la cérémonie traînait en longueur, surtout pour se terminer par la mort inattendue du condamné, alors qu’on lui marquait sur la peau son appartenance à la maîtresse des douleurs, survivant – jusque là - qu’il était des coups de fouet et de la lapidation.
Piètre fin pour un guerrier, que je ne voudrai partager pour rien au monde.

Ce fut tout autrement de retour à Bremen, et la discussion que nous eûmes dans la minuscule chambre que j’avais loué.

Confortablement assis sur le lit, dos au mur, dame Vol’Art me faisait face sur un tabouret, en armure complète, et armé jusqu’aux dents – comme à son habitude -. La pièce n’était que faiblement éclairée par la bougie mourante du chevet. Elle me conta de manière brève et concentrée le passé de Bremen, du rôle qu’elle joue en son sein, de sa fidélité envers le dirigeant actuel, puis passa aux perspectives d’avenir de la ville, sa fortification, sa rénovation. Il fut aussi question de l’Empire et du Prince, son Histoire, les projets en cours, l’idéologie des terres impériales.

Elle me fit aussi savoir qu’elle apprécierait que j’y prenne part, si là était mon désir, et – outre le fait que je lui soit apparu comme capable et presque sympathique, et que sa dernière disciple périt de sa main, faute d’assez de bon sens pour rester respectueuse – qu’elle m’entraînait avec ce secret espoir.

A la vérité, bien qu’elle ne le sache pas, j’éprouve une grande sympathie pour les terres du Nord, l’Empire et ses préceptes, et Bremen me paraît un excellent cadre de vie – bien qu’il manque encore de confort et de vin de qualité -. Je ne l’ai point informée de cela, au demeurant, préférant répondre qu’il me fallait encore un peu de temps pour réfléchir à tout cela. Si ma réponse eut été directe, où aurait été le sel ?

Servir une cause, oui…

*la main saute quelques lignes, on sent qu’une pause à été faite*


Cela fait deux heures que dame Vol’Art prit congé de moi, m’enjoignant le repos. La bougie est plus tenace que prévu, diffusant sa faible lueur sur ma literie, tout du moins dans un rayon suffisant pour me permettre d’écrire.

Je contemple mon cimeterre ; mon passé, qui sent que son heure approche, inexorablement. Les restes de ma vie perdue ne seront bientôt plus que des mauvais souvenirs, car je construirai mon havre de paix dessus, j’en ai l’intime conviction.

Le sommeil me guette, et j’écris là mes dernières lignes. L’ambiance est tranquille de la pièce, aucun son ne vient de l’auberge, endormie à cette heure. La fatigue pèse sur mes paupières, et les images de la soirée défilent dans ma mémoire.

Mon corps tendu, mon arme sifflant dans l’air froid, à la lueur dansante de la torche. Le visage de Davina, faiblement éclairé par la bougie, les traits étrangement détendus en me fixant, tandis que je crois discerner un fugace sourire sur ses lèvres. Mon cimeterre… Ma dame…

Je regarde une dernière fois mon cimeterre, mais ce n’est plus lui que je vois. La demi-elfe me fait face, la mine sévère. Elle sait qu’elle n’en a plus pour longtemps avant que je ne la chasse, sans haine mais sans regret. Une image douloureuse que celle de la jeune femme devant moi.

Je durcis mon âme, et une question malsaine sort muettement de ma bouche : « Dis-moi, Merlose, dans ton regard où se mêlaient peur, colère et désespoir, y ai-je lu de l’amour, tandis que ma lame fouillait tes entrailles ? »

*quelques traits grotesques sur le papier, comme si la main qui tenait la plume s’était assoupie*

(28/08/07, début de soirée) La fureur de l’orc.

*écriture modeste*

Occasion m’a été donnée, par le passé, de rencontrer sur le champ de bataille ce qu’on appelle communément des Berserkers. Un combattant équilibré – il n’y a aucun sous-entendu péjoratif en cela – entretient une subtile balance entre l’attaque et la défense, tandis que le Berserker, lui, sacrifie tout au profit d’un style offensif sans compromis.

La chose peut désarçonner au départ, lorsqu’on ne connaît pas. Par la suite – si tant est-il que l’on survit -, on apprend à se focaliser sur la défense, le temps d’étudier l’adversaire et de trouver l’inévitable faille. Reste ensuite à attaquer entre deux assauts adversaire, en prenant garde de frapper suffisamment fort pour entailler la peau généralement dure de ces barbares.

Autant de choses qui me furent utiles pour ma joute amicale avec messire Gorbad. Malheureusement, le moment de ma contre-attaque venu, il senti à peine mon épée d’entraînement. L’affaire se solda par une égalité mutuellement prononcée, la bonne humeur régnant.

(28/08/07, plus tard dans la soirée) Mondanités.

*les mots, déjà petits, se ratatinent un peu plus*

Même après l’entraînement de soirée, mes muscles les plus douloureux ce jour-là furent sans conteste ceux du cou, et, dans une moindre mesure, du dos. Dame de Montpalme, Messire Commandeur, Marquise, Duc, Maître… Ne serait-ce mon éducation et la civilité que je prétends tenir, mes envies de hurler prendraient le pas.

Il arrive un moment où l’on confond le courtisan – animal de Cour – avec une bête de foire. Ce sentiment m’insupporte au plus haut point. Les rares moments de tranquillité que je connu furent en tête-à-tête avec Merlose, dans le froid qui est désormais mon environnement familier et mon compagnon de douleur, accentuant ma concentration pendant un temps.

Merlose, justement. Le monde s’évertue à m’y faire penser, en premier lieu par cette maudite marquise demie elfe. A choisir, je préférerai encore la forgeronne – cette dernière ayant au moins la cocasserie de la situation, connue de moi seul, à son crédit -. Comme si cela ne suffisait pas, cette marchande use d’une rapière, et d’une façon fort redoutable. Les analogies sont trop grandes pour que me laisser indifférent, et pas pour le mieux.

Je ne tiens plus en place, aussi vais-je continuer mes exercices dans ma suite de Lorgol où je me trouve, d’autant plus qu’il me faut travailler ma souplesse dans les déplacement latéraux – en effet, j’ai remarqué que c’est ce qui me fit le plus défaut dans mon duel avec messire Gorbad -.

Ma lame me pèse. Tu as envie de sang elfique, n’est-ce pas, ma mie ? Si j’accédais à tes désirs, je me noierai dedans…

(28/08/07, la nuit) Confusion.

*écriture bâclée*

Je suis bel est bien à moitié gelé, cette fois-ci. Tenir la plume m’arrache une grimace, tant mes doigts sont gourds et sensibles. Je sens à peine mon torse, mon dos et mes épaules, malgré le bain chaud que j’ai pris dans ma suite à la Plume Noire.

Il n’en fallait pas moins pour calmer ma fureur. Plusieurs heures à m’entraîner dans les montagnes glacées, sans tunique. Les muscles rompus, frôlant l’hypothermie, je dus encore atteindre Lorgol avant de pouvoir me reposer. Et me voilà dans un triste état.

Quelle dérision… Mais revenons quelque peu en arrière.

« L’auberge de Bremen est enfin rénovée », crie-t-on dans le bourg. Convoqué par la marquise à Lorgol, mon Maître au soin avec dame de Montpalme, je n’ai pas le temps de le constater de mes propres yeux. Beaucoup de temps passe, pendant lesquelles je fais la connaissance de la demie elfe – maudit soit son sang – et de son Altesse Ducale.

J’ai l’impression que cela fait une éternité que je n’ai revu mon Maître. Une éternité pendant laquelle je n’ai cessé de courber l’échine, de m’entraîner, de statuer sur mes lendemains qui vont probablement se jouer très prochainement. Je suis déstabilisé, à la croisée des chemins de mon avenir, tandis que mon passé empêtre toujours mon âme. Je suis fragile, bien qu’il m’en coûte de l’admettre. Il me faut m’appuyer sur des valeurs, un fondement solide.

Mon Maître est ce fondement. Ou l’était, je ne sais plus. Imaginez la scène : Je me trouve en noble compagnie, le Duc, la Marquise et messire le Commandeur. Nous voilà devant l’auberge de Bremen, où mon Maître nous y attend. Je me réjouis secrètement de la revoir, ses traits impassibles, sa longue chevelure savamment attachée – d’une manière que je n’explique toujours pas, au demeurant -, même ses éternels katanas.

Effectivement, l’on aurait pu croire qu’il s’agissait de mon Maître, mais je savais qu’il n’en était rien.
Mon Maître, dame Vol’Art, est au-dessus de tout. En tout point.
Mon Maître n’est pas cette jeune gamine, sautillant presque à mesure qu’elle nous menait dans une rocambolesque visite des lieux. Je ne pu me résoudre à achever cette dernière, trop occupé à voiler ma consternation et mon désarroi.

La suite se passa dans le noir, dans l’air pur et glacé de l’Epine Dorsale, mon corps luttant contre un ennemi imaginaire, sans doute moi-même.

Je dois être déraisonnable, de mauvaise foi, trop dur, incompréhensif, mais surtout, possessif.
« Liss di Naneth Sabacca », n’est-ce pas ? Je me rattache de toutes mes forces, après une année de fuite, au seul repère que je possède encore. Je me l’attache, pour être plus précis, j’en fais mien, au point de ne pas tolérer le moindre écart par rapport à l’idée que je m’en étais faite. Et j’en souffre. Je ne sais pas si la douleur vient du corps ou de l’âme, mais elle me vrille l’esprit.

Ma formation au Ki porte en elle tout le fiel de mon cœur, tous mes démons intérieurs. Son aboutissement scellera mon passé, tout comme elle m’ouvrira les portes de l’avenir. Dame Vol’Art est la clef de voûte. Ma clef. J’attends de revivre.

(28/08/07, le néant) Effroi.

*l’écriture est en dent de scie, les mots souvent écorchés par la pointe d’une plume trop appuyée sur le papier*

J’ai peur.
J’ai peur.
J’ai peur.
J’AI PEUR !
...
J’ai peur…

J’ai peur. Je suis seul, allongé dans mon lit, les quatre chandelières que compte ma suite allumées. Merlose gît non loin de la porte, après que je l’y ai envoyé dans un geste violent et affolé.

J’ai de la fièvre, mon corps est tremblant et transpire sans arrêt. Et j’ai peur. Je n’ai plus aucune notion de l’heure, comme si le temps s’était figé pour que mon supplice dure éternellement.

Les cauchemars se sont succédés, des images horribles de jets de sang, de chairs découpées, de membres arrachés, de tripe et boyaux s’échappant d’un ventre ouvert.
On m’annonçait qu’il fallait m’amputer d’une jambe, et je m’entendais répondre aux médecins : « Prenez Merlose pour l’opération, elle n’attend que cela ! ».
Les combats se succédaient, et je me voyais tranché, percé, écrasé par la panoplie guerrière au grand complet de Faêrun.
Et surtout… Je me revoyais sans cesse assassiner Merlose avec l’arme qui portera son nom.
Et surtout… Mon père, Khalim, Grissom, Duran… Le monde entier me fixait, me chuchotait à l’oreille que le dénouement aurait pu être tout autre, que j’aurai pu – que j’aurai du - l’épargner, éclaircir la situation, nous sauver tous deux.
Un concert d’un millier de millions de voix hurle ma culpabilité, ma faute, mon pêché, mon crime, ma damnation.

J’ai peur. J’ai peur et je pleure. Je geins. Seule l’obscure conscience d’être dans l’auberge de luxe de Lorgol me retient d’hurler à tue-tête. J’ai la gorge sèche, de toute façon. Je suis paralysé. Merlose, même au loin, m’emporte dans un abîme de terreur pure, d’absolu désespoir.

Et durant cette tourmente qui n’en finit pas, dans ce tourbillon de folie qui menace de m’emporter définitivement, je me raccroche à l’îlot d’une seule pensée :

Davina, où es-tu ?

(29/08/07, la soirée) Adieu, Merlose.

Le lien est rompu. Cela a du autant me surprendre qu’elle. Qu’importe, Merlose pourrit au fond d’un ravin, dans l’Epine Dorsale.

Faire couler plus d’encre à ce sujet serait un aveu de faiblesse, et je n’ai que trop montré cette dernière. Disons simplement que mon Maître y est pour beaucoup. Ce fut un réel réconfort de retrouver sa mine statique, ses traits impassibles, son discours rationnel, logique, la dureté de ses yeux.

Adieu, Merlose. Il me faut vivre sans toi, désormais.

(29/08/07, la nuit) Remembrance.

*l’écriture est fine et élégante, le style s’améliore*

Les entraînements reprennent, à un rythme plus soutenu que jamais, tant est si bien que je n’ai plus l’impression de vivre autrement qu’avec l’arme à la main. A propos, je me suis octroyé un sabre d’excellente qualité. Je m’habitue doucement à lui, après la disparition de Merlose, mais la prise en main est rapide, et déjà je me sens des affinités avec ma nouvelle lame.

Nous ne parlons pas, en dehors des consignes strictes et claires qu’elle me donne. Mon Maître ne semble pas vouloir engager la conversation. Au demeurant, mon visage mélancolique, mon attitude renfermée, ne font que conforter sa position, même si – bien sûr – je lui donne tout le respect qui lui est dû. Au demeurant, je commence à manipuler le pavois pendant mes exercices. Le poids du bouclier me pèse, mais j’y suis depuis fort longtemps habitué en combat pur.

J’ai visité les géants de froid, aujourd’hui. Ce fut une expérience éprouvante, mais enrichissante. J’affine ma maîtrise, c’est un fait. Ces colosses ont tâté plusieurs fois de ma nouvelle technique, alors que je me concentrais pour leur asséner un coup aux effets démesurés. Le ki approche, même si je ne l’utilise pas encore pleinement et sciemment.

Les rares instants où je ne me retrouve point à m’entraîner ou à explorer les environs, je les passe à Lorgol. J’y vois beaucoup la Marquise, bien que ce ne soit pas vraiment de ma volonté.

Une ombre rôde dans la perle du Nord. Un fantôme insaisissable, que j’ai pourtant aperçu… J’aime cela.

*un point deux lignes plus loin laisse penser que l’auteur a voulu écrire encore quelque chose, mais se serait ravisé*

(02/09/07) Nouvelle arcane.

Les entraînements se suivent et ne se finissent pas. Entre les exercices basiques, les pommes à la place des boules de neiges et le travail du corps et du Ki, je n’ai point de repos !

Mais tous ces efforts ne sont pas vains, ma maîtrise s’améliorant à grande allure, ce qui satisfait amplement dame Vol’Art. Au demeurant, j’ambitionne de découvrir une nouvelle botte, ou plus exactement, de la confirmer en combat. Je n’en ai point encore parlé à mon Maître, au demeurant, il me faut tester cela sur les tigres.

(02/09/07, la soirée) Rosépine.

Durant tout mon apprentissage, j’ai toujours éprouvé un vif attrait pour l’estoc. Non pas que je me pense armé d’une rapière, malgré les diverses moues de dame Vol’Art. Simplement qu’une botte de la pointe, alors que tout prédestine au tranchant, cela peut surprendre.

Et ma Rosépine profite en partie de cet effet de surprise. Depuis l’acquisition de mon nouveau cimeterre – et des modifications que j’ai demandé au forgeron de Lorgol pour l’affiner, surtout à la pointe -, il est plus aisé de porter un coup perçant, même si ce n’est pas le but premier de mon arme, ni mon style de combat, assurément.

L’estoc est une partie modeste de la vaste étendue de techniques possibles au cimeterre, et je joue sur cette « originalité » pour déstabiliser l’adversaire. Le principe, en substance, étant qu’après plusieurs passes d’armes, je jette une nouvelle succession d’assauts sur l’adversaire, mais me fende en plein milieu, la lame dresse à hauteur du poitrail.

A la vérité, Rosépine n’est pas une botte à part entière, mais plutôt le signe d’un changement rapide de rythme pendant la Danse D’acier. Un changement offensif, au demeurant, jouant sur la surprise de l’adversaire.

Oh, bien sûr, cela peut sembler naïf au point d’en sourire, mais le fait est qu’il est pour le moins délicat d’interrompre la litanie initiale pour se lancer – au sens propre comme au figuré – contre l’adversaire, le bras tendu.
Il faut au préalable s’adapter au style de combat de l’adversaire, anticiper ses moments et trouver le moment adéquat pour lancer l’assaut. Même alors, Rosépine reste à double tranchant, car l’ennemi peut réagir de façon rapide et intelligente. Ne reste alors qu’à jouer du pavois – ou du corps – pour se préserver ou accentuer la charge, au besoin.
Enfin, nul besoin de préciser que percer un poitrail en harnois avec une arme solide mais point conçue pour exceller dans le domaine est assez problématique. Là encore, la force et le Ki pénétrant le cimeterre sont une solution, en plus du fait que l’on peut réajuster l’angle pour viser dans la jointure du casque, voir dans le bassin ou le bas-ventre.

Durant l’un de mes nombreux combats fictifs avec dame Vol’Art, le coup porta juste. Elle en fut grandement surprise, mais je dois avouer que les habitudes de mon Maître ne me sont pas inconnues, alors que mon style est encore jeune, et que Rosépine joue justement sur le paradoxe cimeterre/estoc.

Quoiqu’il en soit, ce fut un succès. Je réfléchis encore à un moyen d’améliorer mon arcane, mais à vrai dire mon esprit flâne encore, tandis que dame Davina me félicitait chaleureusement – chaleureusement pour elle, c’est-à-dire l’esquisse d’un sourire aux lèvres -, annonçant que mon apprentissage arrivait doucement à son terme.

Ce n’était qu’un entraînement, et rien n’est fini, pour moi. Mais mon ouverture au Ki s’est doucement réalisée depuis que dame Vol’Art me prit sous son aile, à tel point que je suis maintenant conscient de l’énergie qui circule dans mon corps, et que je véhicule jusqu’à mon membre de métal. Rosépine est l’aboutissement de mon apprentissage, même si ce n’est que le début du Chemin de la Perfection – que l’on n’atteint jamais -.

Validé
tu peux toujours continuer à écrire si tu le souhaites

(17/09/07) Traquenard.

Après mon long séjour à l'Epine Dorsale, me revoilà.

J'ai vaincu mon Maître une fois, et ai foulé le sol à plusieurs reprises. Qu'importe, une seule fois suffit.

Mon Maître... A la vérité, j'estime qu'il y a un lien - même ténu - de confiance entre le Maître et le Disciple. Indibutablement, celui-ci est rompu.

Je suis trop ambitieux, ou du moins le montré-je trop ouvertement. A mon crédit, je pensais que dame Vol'Art saurait se taire. Vain espoir.

Me voilà donc Soldat, attaché à la garde de la Marquise, qui m'a engagé à signer ou à être jugé pour tentative de trahison.

La Marquise, oui...

Le prix de la connaissance.

A force de parcourir des yeux tant d'ouvrages, j'en viens à reprendre ma plume un moment, celle que j'ai délaissé depuis fort longtemps, et pour cause !

La bibliothèque de la Tour d'Obsidienne est pour ainsi dire immense - c'est un euphémisme -, et je doute pouvoir jamais la lire dans sa totalité.

L'accès auprès de l'Archimage se révéla assez onéreux, mais je sais d'ores et déjà que j'ai fait là un investissement.

La bibliothèque se sépare en neuf sections, que je n'ai point toutes parcourues.
Parfait ignorant profane que je suis, mon choix s'est porté à la catégorie des étrangeté de ces terres, un thème bien général.
Ce fut avec grand plaisir que je découvris un ouvrage traitant des vins raffinés, et rien qu'en y resongeant, l'envie me vient de goûter à l'Alurlyath d'Eauprofonde, au Flammevin ou même au vin ambré de Calimshan.
ça ne s'en arrêtait point là, car je trouvais encore un autre tome ayant pour sujet les bières - bien que ce n'est point dans mes habitudes, j'apprécie parfois en consommer -, puis celui des alcools forts.

Il serait trop long de décrire la suite, les divers proverbes, les runes naines, ou un intéressant ouvrages sur les différents alphabets les plus répandus.

Dans un soucis plus terre-à-terre, j'ai jeté mon dévolu sur des ouvrages traitants des créatures fantastiques, et le plus souvent dangereuses. L'incontournable livre sur les dragons a suscité en moi un vif interêt, tout autant que les diables et démons, les créatures élémentaires, les ombres, les géants, et cetera. Tout décrire serait fort long, mais je me sens à présent plus sûr de moi. Je connais les hommes et leurs points faibles, et j'ai le sentiment - peut-être tronqué - que c'est un peu le cas de tous ces monstres, majestueux ou non.

Par la suite, je succombais au sentiment bon enfant d'aller m'enquérir des légendes de ce monde, en apprenant beaucoup sur de puissantes armes telles que les Lamelunes, ou d'étranges entités répondant au nom de Phaerimms. Là encore, la pluralité des ouvrages m'a laissé pantois, et j'ai beau dévorer les livres d'un insatiable appétit, le sentiment écrasant que je ne connais qu'une fraction de toute l'immensité de ces savoirs n'a de cesse de me poursuivre.

Par contre, les récits historiques - beaucoup plus fiables - ont été une vraie mine d'or. J'attache en effet une grande importance du passé - notre présent en est conditionné, après tout -, et je dois avouer que mon coeur a été comblé de découvrir par ces lignes d'anciennes civilisations aujourd'hui disparues, ou de m'enquérir sur l'histoires de plusieurs races humanoïdes qui peuplent ces contrées, dont je vois plusieurs représentant, presque quotidiennement, à Lorgol. Se rendent-ils compte de leur héritage ?

Enfin, ne faisant pour l'instant qu'un vaste tour d'horizon, j'attaquais les oeuvres théologiques, avec nombre d'appréhension, mais l'agréable surprise de découvrit la description complète de chaque divinité, de ses attributs et de son dogme. Autant le Panthéon Humain m'était tout naturellement connu en ces grandes lignes, autant j'avoue à ma courte honte ne jamais m'être inquiété de La Seldarine, laissant aux elfes ce qui appartient aux elfes.

Ne reste que les quatre dernières sections, consacrée - évidemment - à la magie. A la vérité, je n'ai fait que parcourir les bases, comme l'explication de la toile, des neufs écoles de magie, la cosmologie, ainsi que la description des différents plans - chose qui n'a de cesse de me surprendre -, etc.

Ma main se fatigue d'écrire sous l'enthousiasme, tout comme mes yeux, qui ont lu pendant des heures durant à la faible lueur de la bougie de la bibliothèque, tandis que je profitais de mes quartiers libres.

La Garde me laisse bien peu de temps, chose qui ne me dérange aucunement, sans compter mes entraînements quasi-quotidiens. Au moins, mes efforts ne seront pas vains, car je me sens déjà en partie purifié de la crasse ignorance qui m'entourait jusqu'à présent. La connaissance est une arme, dit-on, et je commence à le croire, bien que les livres n'aient aucune connotation artistique...

Mon cimeterre me démange, je vais aller patrouiller dans les faubourgs Est. Quelques bandits sauront bien me distraire.