Une décade s'était ecoulée depuis ce funeste jour. Thamriel demeurait mutique et ne consacrait son temps qu'à veiller sur eux au temple de Bahamut, allant jusqu'à délaisser ses obligations de commandeur pour pouvoir passer ses nuits à leurs côtés, le sommeil se refusant à lui.
Il avait vu ses parents emportés par les miasmes de Talona, ses frères d'armes tomber sous ses yeux, sa cousine mourir sous les coups d'un dragon, maintenant son enfant, au corps brisé, et la dame de ses pensées, qui malgré toutes ses attentions et ses soins risquait de ne plus jamais le reconnaître tant son état mental s'était trouvé ébranlé... c'en était trop...
Sitôt Alenata calmée, on le vit quitter le temple pour se diriger vers le mont Eclair, avec pour tout bagage sa tunique, sans une larme, sans un sanglot, sans un mot, rien si ce n'est une inquiétante lueur dans le regard, qui d'elle même fit s'écarter les clercs et les passants.
Nul ne le vit plus pendant trois jours et trois nuits. L'inquiétude gagnait peu à peu les templiers et les prêtres qui envisageaient d'envoyer une expédition pour le retrouver.
Pourtant, à l'aube du quatrième jour, une apparition se présenta au temple de platine, ne manquant pas de laisser les clercs sans voie. Devant eux se tenait non pas Thamriel, mais le Vassal de Bahamut, ceint du Rempart du grand dragon, l'armure sacrée de son ordre, celle là même qu'il avait forgé de ses propres mains, dans le fer froid et les écailles du vieux dragon rouge qu'il avait du abattre en combat singulier pour rejoindre les rangs des chevaliers de platine. Le Croc de platine battant son flanc, le visage dissimulé par son impressionant heaume, irradiant plus que jamais la puissance de son Seigneur, il jeta un regard interdit aux clercs avant de s'en retourner à la citadelle.
Tous comprirent: leur supérieur partait en guerre, et rien ni personne ne saurait se mettre entre lui et les ennemis qu'il s'était désigné...