[Validé][Guerrier/MDA][H] Shadiz

Nom du compte joueur: Lizen

Nom du perso: Shadiz

Race: Humain

Age: 34 ans

Alignement: Loyal Neutre

Religion: Heaum

Classe(s): Guerrier [18] Maître d’Armes[7]

Arme de prédilection: Grande Hache

Trait de Caractère: D’un naturel sympathique, Shadiz est un personnage à la fois calme et taquin. Bien que d'une patience limitée en société, il est parfois entêté à l'excès dans les tâches qu'il entreprend.

Description physique: D’une taille normale, Shadiz est un homme au teint mate plutôt bien charpenté. Borgne, il porte un cache-œil et arbore souvent une grande hache de bataille qu’il est rare de la voir quitter.

Caractéristiques

FOR: 21
DEX: 13
CON: 16
INT: 13
SAG: 10
CHA: 08

Langues parlées

0- Commun [Racial]
0- Chondathan [Region]
1- Hin [Communauté du halfebourg]

Né en 1363 dans un petit village de la Côte des Epées, Shadiz est le dernier d’une famille de dix enfants. Son père, ancien mineur, avait réussi, après bien des sacrifices, à mettre de côté quelques écus pour faire l’acquisition d’un lopin de terre. Bien que de piètre qualité, l’homme le cultivait avec tant d’ardeur qu’il mettait sa famille à l’abri du besoin, même si l’opulence n’était pas de mise pour autant. Plutôt rachitiques, ses fils l’aidaient comme ils le pouvaient dans ce dur labeur, tandis que ses filles assistaient leur mère, quant à elle toute dévolue aux tâches ménagères.



C’est dans ce milieu tout à fait modeste que Shadiz vît le jour, un beau matin de printemps, sur la table de la cuisine. Petit dernier, il eut le privilège de ne pas être assigné aux travaux agricoles comme le reste de ses frères du fait de son jeune âge. On l’envoyait plus volontiers faire la cueillette de racines et de fruits dans la forêt voisine, ce qui ne manqua pas de lui attirer les bonnes grâces de ses frères et sœurs lorsqu’il ramenait des paniers entiers de fraises des bois ou de mûres. Le dimanche, notre petite famille rejoignait la communauté halfeline du halfbourg tout proche dont ils appréciaient la joyeuse compagnie et Shadiz s’était même amouraché de l’une des filles d’un commerçant d’huiles. Bercés par ces deux cultures, les enfants de la famille parlaient le Hin, ce qui ne manquait pas d’énerver le père qui n’en avait jamais compris un traître mot, et dont les enfants se jouaient pour communiquer entre eux à table, sans retenue sur le vocabulaire employé. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes pour notre jeune garçon.

Mais à mesure qu’il grandissait, ses frères voyaient d’un moins bon œil qu’il continue de passer ses journées à parcourir les bois, panier à la main et chantonnant, tandis qu’eux se tuaient à la tâche pour que la famille ne manque de rien. Autrefois chouchouté par ses aînés, Shadiz devint peu à peu leur souffre douleur au quotidien. D’abord victime de leurs railleries, ils poussaient parfois leur vengeance jusqu’à lui infliger quelques humiliations. Un jour, alors que l’heure du souper allait sonner, ils le déshabillèrent dans le bois qui bordait la ferme et subtilisèrent ses vêtements. Pudique de nature, le jeune garçon n’osait rentrer à la ferme dans cette tenue d’Adam. La nuit tombait et personne ne vint à lui, pas même sa mère qui pourtant lui portait une affection toute particulière. Sommeillant comme il le pouvait en grelottant dans le froid, Shadiz se réveilla au petit matin et se décida, une main devant, une main derrière, à regagner le chemin de la ferme. Arrivé à la lisière du bois, il aperçut la chaumière familiale dénuée de son toit, tandis qu’une épaisse fumée s’échappait de la porte d’entrée. Inquiet, il s’approcha prudemment alors qu’une odeur de chair calcinée lui montait au nez. Un triste spectacle s’offrit à lui lorsqu’il franchit le pas de la porte : les corps éventrés de sa mère et de ses frères et sœurs étaient là, éparpillés, tandis que la tête de son père trônait sur la clôture qu'on pouvait apercevoir par la fenêtre.



Affolé, le jeune garçon tourna les talons et courut en direction du village pour y trouver secours, cachant toujours tant bien que mal sa nudité.

Il constata bien vite que beaucoup de maisons avaient subi les mêmes outrages que la sienne et ne vit pas âme qui vive. Des bras, des pieds et des têtes jonchaient le sol des rues. Shadiz s’assit sur l’une d’elles, posa ses coudes sur ses genoux et son menton dans le creux de ses mains. Après avoir laissé échapper quelques larmes, il se mit à réfléchir. A présent seul au monde, il devait maintenant partir d’ici au plus vite, sans quoi il subirait le même sort que tous ces pauvres villageois. Persuadé d’être seul, il cessa de marcher main devant main derrière et s’aventura dans les rues du village, toujours nu comme un ver. Lorsqu’une voix le fit sursauter.

- « Hey toi ! Saloupiot ! Ta mère t’a appris jamais qui fallait pas t’prom’ner la stouquette à l’air comm’ça ? Dis ! Oh ! »

Alors que la voix s’effaçait doucement pour laisser place à un rot guttural, le jeune garçon reconnut tout de suite Maurice, solide gaillard à la face rougie et aux yeux vitreux. L’homme était célèbre dans la région car champion de descente de chopine. Il était aussi une figure incontournable de la taverne, dont le comptoir se serait sans doute écroulé s’il n’avait pas passé ses journées à le soutenir. Même à plusieurs mètres, on décelait la présence du sieur Maurice, tant l’air se chargeait d’effluves alcoolisées à son approche.



- « Bah c’est que… C’est pas moi…C’est mes frères et toussa… » répondit Shadiz, à la fois rassuré par la présence d’un survivant et intimidé.

Maurice marmonna un « Mouais… » en se grattant la tête, et laissa échapper un nouveau rot d’un air pensif. Jetant un regard aux alentours, il paraissait visiblement surpris par ce macabre décor et lança à l’enfant qui lui faisait face :

- « Mais qu’esse ce c’est c’bordel ?... »

Shadiz le regarda, l’air dubitatif en haussant les épaules. Non content de cette réponse, l’homme tituba dans la rue en direction d’un cadavre percé de plusieurs flèches. Trois pas suffirent à le déséquilibrer, il tomba lourdement au sol dans un gémissement. Après quoi il se mit à ramper, pensant à juste titre que vu son état d’ébriété cela rendrait son déplacement moins pénible. Se hissant jusqu’au corps, il le parcourut du regard et en retira une flèche qu’il examina.

- « Humpf… Encore un coup de ces foutus tribus orques… » maugréa-t-il, avant de se tourner vers le jeune garçon en ajoutant :

- « T’sais quoi gamin ? Bah tu vas commencer par m’aider à m’lever… »

Du haut de ses huit ans et plutôt frêle, notre jeune garçon assista tant bien que mal le bon Maurice à se hisser sur un banc que les orcs avaient miraculeusement épargné pour que ce dernier reprenne un peu ses esprits. Quelques heures plus tard, ce fut chose faite, il avait retrouvé un semblant de sobriété. Il regarda le petit Shadiz et lui dit :

- « On va commencer par t’trouver un truc à t’mettre sur l’dos. Si on t’voit gambader cul nu dans les rues, ça va nous attirer des ennuis. Pis ensuite, on va pas moisir dans l’coin. Les pourris qu’ont fait ça doivent pas êt’loin… »

Sitôt dit, sitôt fait. Sous l’apparence d’alcoolique que tout le monde lui connaissait, Maurice était plein de ressources. Et une fois complètement désaoûlé, ils quittèrent avec Shadiz la petite bourgade pour ne jamais y revenir. Maintenant seuls au monde, notre pilier de comptoir décida de prendre l’enfant sous son aile.

« Pauvre enfant ! » pourraient dire certains. Et bien non. Car avant de dépenser son maigre salaire à la taverne, Maurice avait été un fier et vaillant soldat. Mais la vie ne l’ayant pas épargné, il avait fini comme beaucoup de ces héros de l’ombre : oublié du peuple et harcelé par de noires pensées tant ce qu’il avait vu sur les champs de bataille l’avait marqué. Ce que l’avait amené à devenir un modeste bûcheron et à forcer sur la bouteille dès que l’occasion se présentait. Le récent massacre l’avait pourtant sorti de sa torpeur et une nouvelle vie, la troisième pour ainsi dire, démarrait pour lui.

Après être passé dans le vieux baraquement qui lui servait de logement pour y récupérer sa vieille hache et de quoi manger, Maurice décida qu’il serait préférable, pour la sécurité de son jeune protégé, de trouver provisoirement refuge dans la forêt toute proche. C’était là le seul lieu sûr du coin à ses yeux. Après quelques jours de marche, ils y trouvèrent une caverne suffisamment vaste pour y établir un campement de fortune.

C’était l’époque où la région subissait d’importants troubles politiques sur lesquels s’étaient ajoutés des chefs de guerre orcs en quête d’or, de femmes à violer et de petits enfants à manger, du moins était-ce là la rumeur. Le climat n’était donc pas à la franche rigolade mais plutôt houleux. L’armée ne savait plus à qui obéir et les tribus d’orcs en profitaient pour piller les villages les moins bien protégés. Maurice, bien que soulard émérite, se tenait tout de même au courant de la géopolitique locale. Et il pensait à ce titre qu’une retraite prolongée dans les bois les tiendrait éloignés des affrontements. C’était là peut-être un peu trop optimiste de sa part…

Alors que les premiers froids arrivaient, la forêt n’offrait plus un asile aussi confortable. L’humidité ambiante pesait sur les organismes et le jeune Shadiz, plutôt frêle, s’en plaignait quotidiennement depuis quelques jours. Devant les demandes répétées du gamin, Maurice avait fini par céder et lui avait allumé un feu non sans le mettre en garde que des orcs risquaient ainsi de les repérer. Mais il n’y croyait pas lui-même, pensant que leur cachette était trop loin des campements pour qu’un feu puisse être aperçus par les barbares. Non loin de là pourtant, une troupe de trois éclaireurs orcs rôdait et la colonne grisâtre qui s’élevait dans le ciel ne manqua pas d’attirer leur attention.

Silencieux, ils s’approchèrent à pas de loups. Patientant quelques heures aux abords du petit campement, ils virent bien vite qu’il ne comptait que deux occupants sur lesquels ils auraient facilement l’ascendant, l’un parce qu’il paraissait très vieux, l’autre parce qu’il n’était même pas en âge de porter une épée.

A la tombée de la nuit, alors qu’ils se faufilaient pour attaquer leurs deux victimes, l’un d’eux fit craquer une brindille qui fit se dresser d’un bond le vieux Maurice. Repérés, ils se ruèrent alors en direction de la petite caverne en poussant des cris. Comme par réflexe, le vieil homme s’était déjà saisi de sa vieille hache et, bien que plus très entraîné à la manier, il se tenait déjà en garde, les yeux écarquillés, tremblant sur ses jambes. A quelques mètres de lui, deux orcs armés d’épées couraient vers lui tandis qu’un troisième, en retrait, bandait déjà son arc dans sa direction, un œil fermé et la langue pincée entre les lèvres. Jadis robuste, Maurice n’avait cependant plus vingt ans et il appréhendait déjà la charge des deux éclaireurs qui l’avaient manifestement pris pour cible lorsque la flèche de l’archer partit. L’un des assaillants tomba sur le coup, une flèche plantée en pleine nuque. Alors que l’archer se lançait à lui-même un juron pour sa manifeste incompétence, le second guerrier, armait déjà sa lame pour pourfendre le vieil homme, tandis que Shadiz hurlait déjà comme une truie qu’on égorge.

Il est difficile de ne pas voir en la suite des évènements un signe du destin. En effet, le guerrier toujours valide n’attînt jamais sa cible : sa course prit fin lorsqu’il glissa sur une déjection d’origine humaine dont les environs de la grotte étaient parsemés. Tombant à la renverse dos au sol, son élan le mena pourtant jusque devant Maurice dont la lourde hache déjà levée s’abaissa d’un coup sec. Un craquement de vertèbres se fit entendre et, tandis que la tête de l’orc se détachait lentement du tronc, l’archer avait déjà encoché une seconde flèche. Par chance, celle-ci alla se loger directement dans l’un des cadavres, ratant de loin sa cible. Y voyant une occasion inespérée d’atteindre son adversaire, Maurice le chargea. Alors que l’orc tâchait de se saisir en hâte d’une autre flèche, le vieux guerrier le percuta maladroitement d’un mouvement circulaire du manche de sa hache en pleine mâchoire qui les amenèrent tous deux au sol. Alors qu’ils roulaient et que Maurice se débattait comme un diable, il s’aperçut au bout de quelques secondes que son adversaire ne bougeait plus. Le choc l’avait assommé. Se relevant péniblement, il décapita le dernier survivant en s’y reprenant à deux reprises.



Tétanisé dans son coin, Shadiz avait assisté à ces sanglants évènements de son regard d’enfant. Là où l’observateur y avait vu un vieillard chanceux, le gamin voyait désormais Maurice comme un valeureux héros sur qui l’âge n’avait pas eu d’emprise, capable de pourfendre trois géants en quelques secondes. C’est à partir de cette époque qu’il commença à s’inventer des ennemis imaginaires, tous plus cruels les uns que les autres, qu’il combattait vaillamment de sa hache, matérialisée pour l’occasion par une grosse racine qu’il ne quittait plus. Il tannait même tellement son vieux protecteur pour qu’il lui enseigne le maniement de la hache que ce dernier avait accepté de lui apprendre quelques mouvements basiques à l’aide de bâtons qu’ils s’étaient taillé.

L’hiver s’était déroulé sans autre évènement notoire, fort heureusement pour nos exilés. Et lorsque les beaux jours arrivèrent, le jeune garçon connaissait déjà les rudiments du bâton, prémisses obligatoires au maniement de la grande hache.

Le climat plus clément avait également poussé Maurice à sortir de sa retraite pour s’informer de la situation politique de la région. Les premiers renseignements qu’il avait glanés au sortir de la forêt étaient encourageants. Le pouvoir en place avait retrouvé une stabilité et les tribus orques avaient subi de cuisants revers qui en avaient décimé une partie et fait fuir le reste.

La situation était donc propice à un retour à la vie en société. Leur ancien village ayant été presque totalement rasé, il leur avait pourtant fallu changer de région. Maurice avait retrouvé une place sur les terres d’un riche propriétaire où il bûcheronnait. Le travail ne manquait pas : la guerre avait détruit de nombreuses infrastructures et leur reconstruction nécessitait entre autres choses du bois, beaucoup de bois. Le vieil homme avait arrêté la boisson depuis maintenant un an, s’estimant responsable du jeune garçon que le destin avait placé entre ses mains. Ce dernier ne déméritait d’ailleurs pas et l’aidait volontiers au défrichage et parfois même à la coupe.




La passion du jeune Shadiz pour le maniement de la hache ne l’avait pas quitté. Et souvent, lorsque la journée de dur labeur n’avait pas totalement épuisé nos hommes, ils s’adonnaient à quelques séances d’opposition. Pour l’occasion, Maurice avait taillé dans du bois de hêtre deux répliques de hache de bataille.

Les entraînements passant, la technique de Shadiz s’étayait. Les coups d’estoc directs laissaient peu à peu place à des mouvements circulaires dont la puissance était décuplée par leur grande amplitude. En combat, leur trajectoire horizontale permettait des enchaînements en cas d’esquive de l’adversaire. Par ailleurs, il s’initia également aux techniques défensives grâce auxquelles la grande hache devenait à la fois arme et bouclier par plusieurs postures qui en faisait une arme de parade. Plus tard, Maurice le forma aux techniques complémentaires qui consistaient à utiliser le manche de la grande hache pour des coups assommants mais aussi l’extrémité recourbée de la lame pour pratiquer des croques-en-jambe. Bien que très jeune, il était précoce et l’intérêt qu’il portait à cette activité ne faisait qu’exacerber le don naturel qu’il semblait avoir.

Maurice vieillissait et voyait ses aptitudes physiques décroître de jour en jour. Malgré tout, il tâchait d’en faire fi lorsque celui qu’il considérait désormais comme son fils le sollicitait pour une séance. Sans doute était-ce parce qu’il ne voulait en aucun cas se sentir responsable du moindre échec concernant un jeune garçon aussi motivé et prometteur dans son domaine.

Les années passaient et Shadiz était désormais un adolescent plus charpenté. Le travail en extérieur, hiver comme été, associé à la coupe et au chargement des stères de bois l’avait rendu robuste et vigoureux. Il continuait de pratiquer assidûment le maniement de la hache sur ses heures libres. Son partenaire ayant pris de l’âge, il s’opposait désormais avec des adversaires plus vivaces. Il avait même défié amicalement quelques militaires de la garnison toute proche et bien qu’ayant subi quelques défaites honorables, il s’était taillé une solide réputation pour son jeune âge lorsqu’il avait battu le sergent. Ce dernier, agréablement surpris par la technique du jeune homme, lui avait même proposé d’intégrer l’armée. Mais Shadiz, qui ne pouvait se résigner à abandonner Maurice dont les forces décroissaient de mois en mois, avait alors poliment décliné l’offre.

Moins d’un an plus tard, Maurice décéda, retirant au jeune homme le seul lien qui le retenait au métier de bûcheron. Alors qu’il n’avait pas encore atteint l’âge minimal pour postuler dans l’armée, il menti lors du recrutement et intégra l’infanterie. C’est là qu’il perfectionna encore son maniement de la grande hache durant l’année de formation obligatoire. Plus que des nouvelles techniques, c’est surtout ses déplacements qu’il travailla durant ces longs mois. Seul héritage de son enfance, il avait gardé la vieille hache ébréchée de son père adoptif qu’il ne quittait plus.




Affecté aux troupes de choc, il combattu pour la première fois au front avant ses dix-sept ans et ce, durant quatre longues années. Sur le terrain, il put mettre en pratique nombre des bases de ce qu’il considérait dès lors comme un art. Confronté à des adversaires coriaces et à des situations délicates, il développa même ses propres techniques comme l’attaque en rotation et impressionna nombre de ses pairs par sa rapidité d’exécution dans ses mouvements, seule garante à ses yeux de sa survie. C’est à cette époque qu’il commença à verser sur le papier les principes de bases de la grande hache ainsi que des techniques plus avancées.

Mais il ne finît jamais son manuel. Pris dans une embuscade avec son escadron lors d’une attaque frontal, beaucoup de ses compagnons se firent tuer dans l’assaut, tandis que les survivants furent faits prisonniers. Shadiz était de ceux-là. Torturé au fer par ses ennemis, son corps en gardera des marques inaltérables. Il y perdra même l’œil gauche. Laissé pour mort dans une fosse commune à découvert, il ne dût sa survie qu’à un marchand d’esclaves qui maraudait dans les environs à la recherche de blessés encore en vivants. Et à peine remis sur pieds, il ne tarda pas à être vendu à un organisateur de combats clandestins. Triste tournant dans une vie déjà parsemée de malheureuses expériences.

A nouveau, son excellence fut mise à rude épreuve. La perfection du mouvement avait laissé place à une recherche constante d’efficacité : terrasser ses ennemis le plus rapidement possible lui permit de survivre dans un milieu où l’espérance de vie n’était bien souvent que de quelques jours.

Au cours des mois qui suivirent, il se tailla une solide réputation dans la région en vainquant nombre des adversaires qu’on lui avait opposé. Et, comme tout combattant qui faisait parler de lui par ses faits d’armes, il avait eu droit à son sobriquet : « Le Trancheur ». Et à mesure qu’on le faisait jouter avec des combattants de plus en plus doués, il s’avéra que peu de rivaux lui tenaient réellement tête en duel. C’est pourquoi son maître lui demanda d’assurer le spectacle. C'est à partir de cette date que son style changera, se faisant plus acrobatique, moins conventionnel.

Fréquemment, sans qu’il sache réellement de qui il s’agissait, on le comparait à une légende des arènes clandestines désormais retirée du métier : « Le Hachoir ». Combattant à la grande hache resté invaincu pendant une décennie avant de disparaître, Le Hachoir n’était pas, comme beaucoup de combattants, un esclave. On disait qu’il était descendu dans l’arène parce que se battre était sans doute la seule chose qu’il savait faire et que ça payait plutôt bien.




Cette comparaison éreintait parfois Shadiz. La gloire avait flatté son égo et il se pensait alors imbattable du haut de ses 22 ans. Il proposa même que l’on retrouve ce fameux « Hachoir » pour un duel qui resterait dans les mémoires. On lui rît au nez en lui rétorquant que le bonhomme devait avoir désormais plus de cinquante ans. Shadiz, entêté et avide trouver adversaire à sa taille, demanda à le rencontrer, assuré qu’il parviendrait à le convaincre. Cette requête lui fut accordée par son maître en guise de ses résultats, mais également peut-être parce que ce dernier voyait déjà les profits qu’il pourrait lever si une telle rencontre avait lieu.

Leur entretien eut lieu à huis clos, dans le plus grand secret. Alors qu’un vieil homme d’une cinquantaine d’années s’était présenté devant la cellule individuelle qui servait de chambre à Shadiz, lui avait lancé d’un ton dédaigneux :

- « C’est ça Le Hachoir ? »

Ce à quoi, le vieil homme enturbanné qui se tenait en face de lui, répondit avec un sourire :

- « Et oui, jeune homme, ce n’est que ça. Tu croyais peut-être à l’immortalité. Toute légende finit par vieillir.»

- « Je ne te voyais quand même pas si décrépi. Je pense que tu ne parviendrais même à tenir encore une hache.» lui lança le jeune homme.

- « A quoi cela me servirait-il ? J’ai aujourd’hui de quoi vivre confortablement. J’ai accompli plus que j’espérais dans mon jeune temps. Je n’ai plus besoin de tuer pour vivre.» répondit le vieillard.

- « Ouais ! Mais ça la fout mal pour une légende des arènes !»

Un petit rire illumina le visage du Hachoir.

- « Je n’ai plus rien à prouver mon jeune ami. J’ai connu la gloire. La vraie. Celle que tu ne connaitras jamais puisqu’à ta différence, j’étais libre. Il arrive un temps où même le meilleur guerrier voit son corps se ramollir. L’expérience permet de temporiser quelques temps mais vient un jour où un jeune impétueux plein de talents mais surtout plus vivace vient le détrôner. C’est le cycle de la vie. J’ai quitté les arènes avant que cela n’arrive parce que je le pouvais. Il n’en va pas de même te concernant. Tu seras sans doute une légende pour encore quelques belles années. Et puis, passé 30 ans, tu connaitras tes premières désillusions. A 35 ans, tu subiras ton premier revers et à 40 ans, un Trancheur de 20 ans prendra ta place. Deux ans plus tard, les gens t’auront oublié et n’auront de salive que pour vanter les exploits de ton successeur.» répondit-il.

Shadiz avait visiblement perdu de son assurance.

- « Moi qui pensais te convaincre de m’affronter prochainement.»

A ses mots, le vieil homme éclata de rire. Puis, reprenant lentement son souffle, il s’approcha des barreaux :

- « Tu me fais penser à moi plus jeune. Tu es sans doute le combattant à la hache le plus doué à des centaines de lieues à la ronde et tu aimerais que la région entière le sache. Je t’ai vu combattre. On ne manie pas la hache comme tu le fais sans une profonde envie d’excellence. Mais l’instinct de survie et ton égo t’empêcheront de l’atteindre. Tu as dû être plus jeune persuadé de pouvoir atteindre le summum de ton art. Mais aujourd’hui, tu es plus avide d’un public qui scande ton nom que d’un geste réalisé à la perfection. J’ai connu ça moi aussi. Et crois-moi sur parole, ce n’est pas dans une arène que je suis devenu maître dans le maniement de la hache. Je venais y chercher de quoi manger. L’excellence, je l’ai approchée loin des yeux des spectateurs, seul, en tête à tête avec ma lame.»

- « C’est donc un non, vieillard ?» lui rétorqua Shadiz qui campait sur ses positions et tentait de l’énerver.

- « Tu es perspicace pour un gladiateur.» trancha le vieux.

Puis il ajouta :

- « Ta condition te voue à une mort certaine et je comprends ta manière de penser. Si tu étais libre de tes choix, tu aurais pu devenir celui que tu espérais étant enfant. Je te souhaite la vie la plus longue qui soit. Profite des quelques années qu’il te reste et des plaisirs simples que ta vie d’esclave te permet.»

Alors que le vieil homme s’éloignait déjà. Des cris résonnaient dans les souterrains de l’arène : ceux d’un Shadiz hors de lui, insultant l’ancienne légende de lâche et de dégonflé.

Les semaines qui suivirent cet entretien furent difficiles pour Shadiz. Les paroles du vieux Hachoir l’avaient changé. Il ne combattait plus aussi vaillamment. C’était devenu une machine à tuer et il ne s’émouvait plus des cris de la foule à chacun de ses coups de grâce. Son esprit vagabondait et lorsqu’il revenait dans sa cellule, il y tournait tel un lion en cage. Sa condition d’homme esclave ne lui avait évidemment jamais plu, mais il s’en était accommodé. Pourtant, il savait désormais que ce qu’il espérait secrètement ne pourrait être atteint ici.

C’est à cette date qu’il commença à se réfléchir plus sérieusement au moyen de s’évader. La solution lui vînt de la fille de son maître, une jolie petite brune d’à peine quinze ans qui venait lui apporter ses déjeuners et soupers. A bien l’observer, il comprit vite avec quelle admiration elle le regardait dévorer ses rations. Bien qu'elle était très timide, il parvînt à établir discrètement le dialogue et commença un long travail de séduction. Il n’était pas très doué, pas bien beau mais sa réputation jouait pour lui. Et au bout de quelques semaines, l’adolescente buvait déjà ses paroles.

C’est avec son aide qu’il mit au point son évasion, la convaincant qu’ils fileraient ensemble vers des cieux plus cléments, qu’il l’aimerait toujours, et qu’ils fonderaient une famille. Les disputes répétées avec son père et l’amour sans limite qu’elle portait désormais à Shadiz, son aîné de presque dix ans avaient fait le reste. Et par une nuit de pleine lune, les tourtereaux prirent la poudre d’escampette. A la sortie de la ville, alors que Shadiz demanda à la jeune fille de rester cachée dans une grange à foin tandis qu’il se débrouillait pour leur voler un cheval, elle s’exécuta sans broncher, songeant déjà à l’idylle qu’ils allaient bientôt vivre, les yeux brillants. Elle y restera deux jours avant qu’un paysan ne la découvre et sera ramenée chez son père manu militari. Shadiz, quant à lui, était déjà loin.

Voyageant de nuit, il avait réussi à glaner quelques informations concernant la retraite du Hachoir auprès de paysans et bûcherons de la région, en toute discrétion. Et c’est après quelques jours de marche qu’il parvînt à rejoindre le refuge du vieillard, de son nom Alshim, dans une petite clairière reculée.

Devant la surprise affichée du maître des lieux, Shadiz fît amende honorable, insistant sur l’aveuglement dont il avait fait preuve quelques mois plus tôt, lors de leur rencontre. Il tâcha de trouver les mots justes pour qu’Alshim comprenne son initiative sans vraiment comprendre lui-même quelle voix intérieure avait guidé ses pas jusqu’ici. Le vieil homme, dans un sourire dur mais amical le fit taire et lui dît :

- « Cesse de t’égosiller de la sorte. Il n’est point de mots pour décrire ce que nous autres cherchons. Inutile donc de t’égarer dans des démonstrations verbales où tu te perdrais. Tu es venu pour trouver ce que ton cœur te souffle depuis que tu as tenu ta première hache. Et c’est là une chose qui m’est familière puisqu’il y a quelques dizaines d’années de cela, j’ai ressenti la même chose. Repose-toi et demain, nous en reparlerons à tête reposée.»

Le lendemain, les deux hommes eurent une longue discussion à l’issue de laquelle Shadiz réussît enfin à savoir ce qu’il était venu chercher auprès du Hachoir : un maître qui lui permettrait de trouver la voie de l’excellence dans l’art de manier la grande hache de bataille. Et Alshim, qui de son jeune temps n’avait pas eu la chance d’avoir un mentor qui lui aurait fait partager son expérience, trouva dommage de refuser, connaissant les prédispositions que le jeune homme qu’il avait en face de lui avaient développées.

Les mois qui suivirent ne furent bizarrement pas dévolus au maniement de la hache. Shadiz en maîtrisait déjà bien des aspects, tant sur le plan technique que stratégique. L’exécution de ses mouvements horizontaux et verticaux était presque parfaite tandis que de longues années passées à guerroyer ou à combattre dans une arène lui avaient enseigné qu’un bon placement des appuis couplé à des feintes efficaces suffisait à s’assurer la victoire. Ce qui lui manquait désormais était ailleurs : ses assauts bien que rapides et précis manquaient parfois de puissance. Contre des adversaires mal équipés, cela ne l’avait jamais réellement gêné mais il avait quelques fois connu plus de résistance contre des combattants en armure lourde. Et l’amplitude ne semblait pas y changer grand-chose, il lui fallait travailler désormais en osmose avec son arme pour en tirer le meilleur parti.

C’était le but des exercices proposés par Alshim. Le premier d’entre eux consistait en une méditation de plusieurs heures. Destinée à éveiller la conscience du jeune Shadiz à son propre corps, ces moment lui étaient pénibles et paraissaient interminables. Lui qui tenait difficilement en place plus de quelques minutes, ces longues séances étaient éreintantes. Et sa réticence aux bienfaits de cette technique transformait la chose en un calvaire qui l’épuisait tant physiquement que mentalement. Quelques mois passèrent ainsi, avant qu’il ne se familiarise avec ces repos forcés. Il commençait peu à peu à en tirer bénéfice sans s’en rendre tout à fait compte. Une force intérieure grandissait en lui. Elle avait sans doute toujours été présente mais n’avait jamais pu s’exprimer pleinement. Des pensées trop superficielles l’en avait empêché. Et déjà, Shadiz en percevait les effets sur son style : ses coups devenaient plus appuyés, les impacts se faisaient plus violents.

C’est à partir de cette période que les choses s’accélèrent pour lui. Les entraînements martiaux reprirent. Mais à défaut d’adversaires, le jeune apprenti fut confronté à des objets bruts. Dans les premiers temps, ce furent de larges rondins de bois qu’il dût fendre d’un seul coup. Une tâche à la fois formatrice et pratique puisque l’hiver approchait. Shadiz s’en acquittait à merveille et sans trop de difficulté. Mais les choses se corsérent quand il fut confronté à une large porte de chêne aux battants de fer forgé que son maître lui demandait de pourfendre en son centre. Ce fut là un apprentissage qui dura jusqu’aux beaux jours. Essayant et essayant encore, il ne parvînt à la briser d’un seul coup qu’au début du printemps. Il comprit alors qu’il ne devait plus considérer sa lame comme un objet mais comme une extension de son bras, de son être, de son esprit. Sans qu’Alshim n’eût à devoir mettre des mots sur cette sensation elle était venue naturellement. C’était là aussi la richesse des enseignements du vieillard : n’ayant jamais eu de disciple, il pensait que les choses viendraient d’elles-mêmes comme c’eût été le cas jadis, pour lui. Durant l’été, l’exercice s’était poursuivi avec un large bouclier qui avait su résister jusqu’au début de l’automne. Cabossé de partout, il avait fini par se fendre sous les coups répétés du jeune entêté.

Sans le montrer, Alshim était fier de son poulain. Il l’avait amené en moins de deux ans là où il lui avait fallu à lui près d’une décennie. Et les entraînements continuaient sans baisser d’intensité, jour après jour. Car tout ce que Shadiz connaissait jusqu’à présent du maniement de son arme devait être réappris pas-à-pas pour que chaque coup, chaque parade, chaque croque-en-jambe soit rendu plus efficace par le Ki. Il n’était plus question ici de mois mais d’années. Et c’est à l’aube de ses 29 ans que Shadiz avait fini par réussir l’ultime défi lancé par son maître. Il parvînt à fendre trois boucliers, l’un situé devant lui qu’il avait atteint d’un circulaire vertical, un autre à sa gauche pour lequel il devait se décaler et dégager ses hanches pour le frapper à pleine puissance d’un circulaire horizontal et enfin, le dernier, situé derrière lui qu’il attînt grâce à un demi-huit retourné. Le tout en une seule tentative.

Il lui avait fallu six années mais il était finalement parvenu à atteindre le but qu’il s’était fixé. Le ki faisait désormais partie intégrante de son style et lorsqu’il portait un coup de sa hache, l’impression soudaine d’une main tranchante au bout de son bras se faisait jour en lui. Il ne portait plus sa hache : il était sa hache. Et réciproquement.

Une semaine se passa avant qu’Alshim ne lui offre une grande hache de bataille qu’il avait spécialement faite forger pour lui. Le manche était massif mais pourtant très léger ce qui la rendait solide autant que maniable. La lame, faite d’un alliage d’acier et d’un métal jaunâtre, était aiguisée comme un rasoir.




- « Elle est à toi, forgée à ta taille et à ton poids.» lui confia-t-il en la lui tendant.

Après quoi il ajouta d’une voix pleine d’émotions qui ne lui était pas familière :

- « Te voilà devenu maître dans l’art de manier ta hache. Je n’ai plus rien à t’apprendre. Tu dois désormais suivre ton propre chemin, Shadiz. Et qui sait, un jour peut-être tu auras la chance de rencontrer un jeune homme arrogant à qui tu devras tenir le même discours que celui que je t’ai tenu voilà quelques années. Tu le prendras alors sous ton aile et tu vivras la plus belle expérience de ta vie. »

Après avoir fait ses bagages, une longue accolade entre les deux hommes firent couler des larmes sur les joues du jeune homme. Et bien qu’il ait juré de se retenir, Alshim avait les yeux humides.

Quittant la compagnie de son maître, Shadiz n’avait à ses débuts aucune idée du métier auquel il allait désormais se destiner. Ne sachant pas faire vraiment autre chose que se battre, il trouva finalement un poste d’instructeur dans l’armée où il formait d’abord les recrues puis il y enseigna le maniement de la hache à trouble tranchant aux troupes d’élite. Bien qu’il ne s’agissait pas là de son arme favorite, elle comportait cependant moins de techniques et ce qu’il connaissait lui suffisait amplement pour accomplir à bien ce pour quoi on le payait.




Après deux ans passés dans l’armée, il décida avec un collègue de ne pas rempiler et partît avec ce dernier qui comptait se mettre à son compte comme chasseur de prime. Faisant office de gros bras dans leur affaire, il réussît à amasser quelques confortables revenus, notamment en récupérant quelques objets volés à de riches négociants nains. Mais au cours d’une poursuite, nos deux compères furent pris dans une violente embuscade. Shadiz eût la chance d’y réchapper de justesse mais son ami ne connût pas le même destin et finît éventré par un hors la loi déguisée en prostituée. Triste fin à bien y songer.

Désormais seul au monde, comme à bien des reprises dans sa vie, Shadiz avait décidé de quitter la région, où les têtes mises à prix se faisaient de plus en plus rares depuis l’arrivée d’un nouveau gouverneur qui avait donné des moyens conséquents aux gardes locales pour éradiquer le brigandage. Ses pas le guidèrent aux environs du Val de Bise en cette année 1397, ayant entendu parler des difficultés que les autorités rencontraient dans le maintien de la sécurité de la route marchande du Nord.

Bon alors...
là je dois dire que je suis enmerder je ne sais vraiment pas quoi dire...DE MAL !

l'histoire est interessante, pleine d'humour, j'aime particulièrement la rencontre avec le vieux maurice.

Toute son évolution est bien mise en avant !
Sa jeunesse ses aspirations d'exellence dans le maniement de la grande hache, sa vie d'esclave, sa première rencontre avec son vieux maitre, son évasion, son entrainement intensif.

Et là je trouve ça tres tres poussé pour les techniques de combats on s'imagine bien le personnage de cette manière bougé lors des combats virvolté dans tout les sens pour vendre chérement sa peau lors d'un combat à mort !

La méditation et le ki sont des éléments bien présent eux aussi et le lien qu'il entretient avec son arme également...

Alors voila ! Validé