Prière au Voyageur Divin

Dans un bâtiment près du Port, un petit escalier mène à un couloir longiligne, bordé de portes somme toutes classiques, donnant sur des autels religieux aussi divers que l'est la cosmopolite Luskan. Talona, Valkur, Talos ou encore Shaundakul, et c'est ce dernier que le voyageur Pharyll vint voir.
Déposant quelques offrandes dans la coupe réservée à cet effet, or, pierres semi-précieuses, et bottes magiques, il entama une prière. Si le dieu avait porté son divin regard sur son priant, il aurait vu des blessures encore fraîches, des traces de griffes assez peu conventionnelles.

"Shaundakul, dieu qui parcourt les innombrables routes des Royaumes, qui protège les voyageurs de son souffle, et qui fait parcourir les lieues plus vite qu'un cheval, accorde-moi cette prière. Sache que le voyageur que je suis, en quête de connaissance, a connu l'échec il y a encore quelques jours dans l'étape cruelle de Port-Llast. Elle est le théâtre des forces non-maîtrisées des hommes, des elfes, elle est une ruine aujourd'hui, alors qu'elle était pleine de vie aujourd'hui.

Même si je déplore ceci, même si je ne peux que m'insurger devant cette destruction inutile d'un village, je veux aujourd'hui étudier cette ruine, qui est une opportunité unique pour la recherche et la connaissance. Elle est l'image instantanée de la destruction. Elle n'est pas une ruine créée sur des années, elle a été créée d'un coup d'un seul... elle n'est pas due à un abandon progressif qui fausse la valeur des reliques du passé, car elle a bien été soumise à un cataclysme ponctuel.

Je te demande ta protection dans ce lieu dangereux, dans ce lieu où la Nature semble aussi féroce que le pire des mages nordiques. Je te demande d'étendre ton égide divine sur ma tête, afin de protéger mon étude des inconvénients de l'hostilité animale de ces lieux. Les lycanthropes peuplent Port-Llast, et je souhaite ne pas en rencontrer.
Je te demande aussi ta protection pour cette blessure qui m'impose de me reposer et de me soigner à l'aide des plantes, comme décrit dans mon herbier.

Shaundakul, puissent ces offrandes te convenir, et te permettre d'exaucer ma prière. Puissent ces gemmes égaler la valeur de ta protection, car elles sont pour moi une de mes rares richesses. Puisse cet or convenir à tes prêtres, même si je ne puis consentir à plus grand sacrifice qu'en m'imposant un jeûne que je ne peux pas accepter sans mourir.
Shaundakul, puisses-tu exaucer ma prière, si ce n'est pour moi, alors pour la connaissance des trésors des routes."


Inclinant la tête une dernière fois devant cet autel où il n'avait encore jamais prié, du moins à Luskan, il reprit la route vers Garfaux. Cette étape aussi nécessaire pour un Luskanien qu'une auberge de nuit pour un voyageur, commençait à lui faire le même effet que tous les aventuriers de la région. Un havre, c'était un peu la maison que chacun avait quitté. Garfaux était toujours là pour apporter le réconfort dans les vies dures de ces hommes, quelques pièces contre une bière, contre un bon repas de lard, contre une étreinte dans les bras d'une fille de joie. Tout ce que l'aventure faisait regretter, Garfaux l'apportait une fois rentré. Et alors, l'on comprenait la valeur de la vie, la valeur de ces plaisirs dont la route vous prive.